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Parmi ces tarifs internationaux, les uns sont absolument réciproques et les transports qui s’effectuent aux conditions de ces tarifs sont taxés de même dans les deux sens. C’est le cas, pour la compagnie Paris-Lyon-Méditerranée, de ses tarifs italiens, dont l’action (sauf pour les vins, dont nous parlerons tout à l’heure) a survécu à la dénonciation que l’Italie a cru devoir faire de ses traités de commerce avec nous. De même que deux régions différentes de la France, l’une au nord, l’autre au midi, échangent leurs produits, de même aussi, et a fortiori, deux pays limitrophes, de climats aussi différens que la France et l’Italie, l’un plus industriel, l’autre plus agricole, ont intérêt à s’acheter et à s’expédier l’un à l’autre les objets qu’ils ne fabriquent ou ne produisent pas et qu’ils consomment. De ces tarifs internationaux réellement réciproques, il n’y a évidemment rien à dire.

D’autres tarifs internationaux, tout en étant réciproques, ne jouent, en fait, que dans un sens; c’est le cas du tarif 206 Paris-Lyon-Méditerranée, par exemple, relatif aux vins, la France n’envoyant pas de vins communs dans un pays qui, comme l’Italie, ne sait où placer sa surabondante production.

D’autres enfin ne sont pas réciproques; ils sont purement de pénétration en France et s’appliquent : soit à des marchandises que notre pays ne produit pas (oranges) ; ceux-là, on ne songe pas encore à les incriminer, — soit à des matières que notre pays produit, mais en quantité insuffisante pour sa consommation (houille, vins), — soit enfin à des marchandises que notre pays produit, mais, en raison du climat, plus tard que certains pays étrangers (fruits frais, légumes frais). Ce sont ces deux dernières catégories que nous discuterons plus spécialement. Mais entendons-nous bien tout d’abord.

Dans le vocable tarifs de pénétration, il y a deux choses à distinguer : la pénétration et le tarif. En ce qui concerne la pénétration, demandons-nous en premier lieu si, pour certains produits, elle est fâcheuse, ou inutile, ou évitable.

Les oranges, par exemple, ne sont pas un fruit indispensable à l’alimentation ; mais si l’on en veut consommer, il faut bien les tirer de l’étranger pour les faire pénétrer en France, puisque notre pays n’en produit pas.

Pour les fruits et légumes frais que nous produisons. Dieu merci, en grande abondance, on pourrait assurément n’en consommer qu’au moment où nos jardiniers français les produisent, et le reste de l’année se contenter de légumes secs ou conservés : c’est ce que, par vertu ou par nécessité, faisaient nos pères; mais cette sagesse ou cette résignation, nous ne l’avons plus, du fait des