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UNE INDUSTRIE PASTORALE.

suites contre un délinquant, elles seront exercées parle syndicat tout entier, et les gérans n’auront à encourir aucune espèce de responsabilité. En cas de difficulté avec les marchands de fromages, le bureau du syndicat pourra servir d’arbitre, ou se charger de soutenir les droits de la fruitière devant les tribunaux. Ainsi, les gérans n’auront plus à craindre de se faire un ennemi mortel en dénonçant un voisin, les voilà désormais déchargés de ce lourd tracas. Ce n’est pas tout : le syndicat pourra acheter en gros, obtenir à meilleur compte certaines fournitures importantes ; enfin, les délégués des fruitières se réuniront de temps en temps, afin de contrôler l’utilité des réformes dans l’outillage et la comptabilité, discuter les intérêts généraux de leur industrie, se concerter sur les prix courans de la marchandise.

Quant à la caisse de secours mutuels, rien de plus ingénieux que son organisation, de plus simple que son fonctionnement. Un membre du syndicat remet au président une formule sur laquelle il inscrit la liste des animaux pour lesquels il veut s’assurer, leur âge et leur signalement, le lieu où ils se trouvent, la valeur de chacun d’eux : le président prend l’avis du bureau, et, assisté de deux administrateurs, statue à bref délai. Chaque adhérent paie une cotisation annuelle de 0 fr. 75 par 100 francs de la valeur déclarée et acceptée. Sur le total des cotisations, on prélève les frais d’administration de la caisse et un dizième qui est porté au compte de réserve. Le règlement, le paiement des secours se font dans la quinzaine qui suit l’apuration des comptes de l’exercice périmé ; les sinistres provenant de violences, manque de soins ou mauvais traitemens exercés sur les animaux par les sociétaires ne donnent lieu à aucun secours ; en cas de maladie ou d’accident survenu à l’une des bêtes déclarées, le propriétaire est tenu de la faire soigner à ses frais et de prévenir un des membres du conseil d’administration.

Voilà les bases de l’institution ; elle a réussi à merveille, rend des services signalés et devrait trouver place dans chaque société de fromagerie : une petite amélioration consisterait à avoir un abonnement avec un vétérinaire payé sur les fonds de la caisse. Aussi bien, la loi du 21 mars 1884 permet aux syndicats agricoles de fonder des sociétés d’assurances mutuelles dans lesquelles les adhérons mettent en commun certains risques et se garantissent contre les dommages causés par un fléau ; elles peuvent se constituer par acte sous-seing privé, sans autorisation du gouvernement, et n’ont pas le caractère commercial. Un bon système d’assurances agricoles, mettant le cultivateur à l’abri des causes de ruine auxquelles l’exposent la grêle, l’épizootie, serait un immense bienfait.