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chevelure, qui cachait un peu son front pur. Puis, se rasseyant sur sa marmite, il se mit à chanter à mi-voix, pendant que Melitza l’écoutait avec admiration, assise à ses pieds dans l’herbe chétive et meurtrie par la multitude des combattans :

Voilà une petite nacelle.
Qui vogue sur le lac bleu.
Mon cœur se gonfle de bien-être
Quand je la vois passer.
Quand une forte tempête
La pousse vers le rivage,
Une jeune fille prend les rames,
Une jeune fille qui chante gaîment.
Viens, Melitza, viens sur ces bords ;
On est bien ici pour demeurer,
Quand tu reposes sur mon cœur,
Où il n’y a d’amour que pour toi.
C’est bien là le meilleur port
De tout l’univers.
L’ancre est dans mon cœur.
Et tu es enchaînée à mes lèvres.


SACHER-MASOCH.