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LE
GRAND CLASSIQUE
DU ROMAN ANGLAIS

HENRY FIELDING.

Fielding est, comme Molière, un de ces auteurs excellens dont le solide génie est fait surtout de bon sens. Un écrivain, un homme éminemment sensé doit être la clarté même : aucune ombre mystérieuse n’enveloppe l’œuvre ni le caractère de Fielding. Sa vie peut offrir des parties mal connues, elle n’a rien de psychologiquement obscur, et, quant à son style, il est tel qu’on devait l’attendre d’un ami si intransigeant de la lumière qu’il n’admettait point l’existence des prétendues beautés littéraires dont le sens est ambigu. Dans une fantaisie satirique intitulée : Voyage dans l’autre monde, il nous montre Shakspeare consulté par deux commentateurs en querelle sur le sens d’un vers d’Othello : « Ma foi ! dit le poète, je l’ai bien oublié depuis le temps… Mais rien ne me confond plus que la peine qu’on se donne pour découvrir des beautés obscures dans un auteur. A coup sûr, les beautés les plus belles et les plus utiles sont toujours celles qu’on voit en plein à première vue, et quand deux significations d’un même passage peuvent tenir le moins du monde l’esprit en balance, je mets en fait que ni l’une ni l’autre ne vaut un liard. »