Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 101.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La conclusion est la même. Le temps met à sa place ce qu’il ne détruit pas.

Il ne servait à rien de donner aux pamphlets le titre d’impostures, il fallait faire la preuve ; si elle était possible, on l’aurait avouée depuis longtemps. Pour appeler, au début de ce siècle, les Provinciales « les menteuses, » il fallait l’impudence de Joseph de Maistre. Toutes les assertions sont exactes ou ne contiennent que des erreurs où la bonne foi n’est pas engagée ; mais rien n’était nouveau. La Sorbonne avait depuis longtemps censuré la Somme des péchés du père Bauny et condamné les maximes et les décisions stigmatisées quinze ans après par Pascal.

La Faculté écrit à Richelieu, en demandant l’autorisation de publier sa censure :


« Monseigneur,

« Le sage fils de Syrac a parfaitement bien dit que les hommes se chargent d’une grande occupation et qu’il y a un joug pesant qui presse les misérables enfans d’Adam. Or, il nous semble, monseigneur, que, dans la rencontre présente, on peut fort bien entendre par ce joug, cette monstrueuse masse de nouveaux livres dont nous sommes accablés, que l’on peut appeler des faulx volantes, qui moissonnent la beauté des champs de l’Église, et détruisent tout l’ornement du Carmel. »


Les propositions de Bauny citées par Pascal sont les faulx volantes que la Sorbonne signale et condamne.

Dix ans avant la censure de la Sorbonne, Du Moulin, pour attaquer la confession, avait réuni les passages scandaleux des casuistes, et Arnauld, après Du Moulin, mais longtemps avant Pascal, avait allégué contre les jésuites tous les textes cités dans les Provinciales. Arnauld n’avait produit, non plus que Du Moulin, ni bruit ni scandale. Tous deux cependant étaient célèbres. On appelait l’un le grand Arnauld.

Pascal a expliqué les succès différens obtenus par les mêmes armes : « Quand on joue à la paume, c’est une même balle dont on joue l’un et l’autre, mais l’un la place mieux. » Du Moulin montrait la balle ; Arnauld la lançait selon les règles ; Pascal la jette plus fort que jeu à la tête de ses adversaires.

Du Moulin attaque l’église catholique ; Pascal la vénère. Tous deux dénoncent des offenses à la morale, mais la malice de Du Moulin associe au scandale les docteurs et les saints, les papes et les conciles. Les jésuites chez Pascal sont responsables de tout. Du Moulin s’attaque à leurs maitres. Les choses valent mieux dans