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LES


PREMIERS ROMANTIQUES


ALLEMANDS



I. R. Haym, Die Romantische Schule. Berlin, 1870. — II. Jakob Minor, Friedrich Schlegel’s Prosaïsche Jugendschriften. Wien, 1882. — III. Friedrich Schlegel’s Briefe an seinen Bruder August Wilhelm, herausgegeben von O. Walzel. Berlin, 1890.


« Les trois grands courans de notre siècle, a écrit Frédéric Schlegel, ont été déterminés par la révolution française, par le Wilhelm Meister, de Goethe, et par la Doctrine de la science de Fichte. » Le rapprochement est inattendu, et paraît plus bizarre que frappant. C’est ce que voulait l’auteur, et sa formule est donc excellemment romantique, rien n’étant plus « romantique » que d’exprimer une vérité sous forme de boutade. Il faut à la pensée originale le grain de sel qui l’assaisonne, le condiment de l’ironie. Tant pis pour le lecteur qui prend le paradoxe au pied de la lettre : il se met lui-même au rang des philistins, et ce n’est pas pour lui que Fr. Schlegel a écrit. Mais il se trompe encore s’il n’aperçoit pas le sens profond caché sous la boutade. Car le paradoxe enveloppe une vérité sérieuse, et le tour piquant qui lui est donné ne doit pas en faire méconnaître la valeur. Si la révolution française a marqué le début d’une période nouvelle dans la vie politique de l’Europe, le roman de Goethe et le système de Fichte sont les signes d’une révolution non moins importante dans la philosophie et dans l’art.