difficulté. Si le permis d’imprimer est du 2 janvier 1693, l’achevé d’imprimer n’est que du 3 septembre. Le livre même n’a donc été mis en vente qu’après la mort de Mme de La Fayette. Mais il n’est point invraisemblable de supposer que Barbin ait communiqué ce que nous appelons aujourd’hui les bonnes feuilles à Mme de La Fayette, qui peut-être avait corrigé les précédentes épreuves. C’était la première édition des Maximes qui parût depuis la mort de La Rochefoucauld, et Barbin devait attacher beaucoup d’importance à ce qu’elle fût correcte. Le fils de La Rochefoucauld, grand maître de la garde-robe, retenu par sa charge à Versailles dont il ne bougeait guère, n’était pas homme à y donner beaucoup de temps. Rien de plus naturel que Barbin, éditeur de Mme de La Fayette elle-même, lui ait communiqué ces épreuves et qu’il ait pris ses conseils, tout comme un siècle plus tard les amis de Buffon prenaient les conseils de Mme Necker sur tout ce qui concernait la mémoire du grand homme. Une preuve assez forte vient à l’appui de cette supposition. C’est une singularité de pagination. L’édition de 1693 est la première à laquelle aient été ajoutées cinquante maximes posthumes trouvées dans les papiers de La Rochefoucauld. Les treize feuillets qui contiennent ces maximes et qui auraient dû naturellement venir à la suite, sont au contraire en tête du volume. Mais ils ne portent aucun numéro de pagination. C’est donc qu’ils ont été imprimés après coup. Or ce sont les seuls qui ne portent aucune annotation. Vraisemblablement l’impression en aura eu lieu après la mort de Mme de La Fayette et aura retardé jusqu’en septembre 1693 l’achevé d’imprimer, tandis que les épreuves du volume lui-même (dont l’impression n’exigeait pas beaucoup de temps) auront pu lui être communiquées dès le commencement de l’année.
Il semble que la question pourrait être tranchée souverainement par une vérification d’écritures ; mais il n’en est rien. Que ces annotations ne soient pas de la main même de Mme de La Fayette, cela est hors de doute, mais en même temps cela n’est d’aucune preuve. Mme de La Fayette, dans les dernières années de sa vie, écrivait rarement de sa main. « Pour bien peu de personnes aujourd’hui je fais cet effort, » dit-elle dans une de ses lettres à Ménage. Elle se servait habituellement d’un et même de deux secrétaires, car ses lettres à Ménage ne sont pas toutes de la même écriture. Donc rien d’étonnant à ce qu’elle ait dicté ces annotations comme elle dictait ses lettres. Ces annotations sont au reste de deux écritures différentes, et celles-là qui sont de la même écriture ne datent pas toutes de la même époque, car il arrive souvent qu’elles se complètent ou même se contredisent. Ceci aide à résoudre une