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A PROPOS
D'UN
EXEMPLAIRE DES MAXIMES

C’est une question qui souvent a piqué la curiosité de savoir si l’étroite liaison de La Rochefoucauld avec Mme de La Fayette n’aurait pas exercé sur lui quelque influence adoucissante. Souvent, en particulier, on s’est demandé si l’opinion défavorable que l’auteur des Maximes entretenait des femmes n’aurait’ pas été modifiée par l’amie toute-puissante dont la modestie aimait à répéter : « M. de La Rochefoucauld m’a donné de l’esprit, mais j’ai refusé son cœur. » D’ingénieux commentateurs se sont exercés sur ce sujet, et, dans les cinq éditions des Maximes qui se sont succédé du vivant même de La Rochefoucauld, ils ont cru reconnaître certaines variantes que Mme de La Fayette aurait bien pu inspirer. D’autres se sont au contraire étonnés, avec plus de raison, je le crois, que cette influence ne se soit pas fait davantage sentir et que les Maximes n’en portent aucune trace bien apparente. Mais ce qui serait plus intéressant encore à connaître, ce serait le véritable jugement de Mme de La Fayette sur les Maximes, — j’entends non pas un jugement général comme celui qu’elle a pu porter, à la suite d’une première lecture, dans un billet à Mme de Sablé que nous possédons, mais un jugement explicite sur chacune des maximes en particulier. On aura peine à me croire si je dis que nous sommes peut-être en possession de ce trésor, et que cependant, soit scrupule, soit inadvertance, les biographes de Mme de La Fayette se sont jusqu’à présent abstenus d’y puiser. M. Aimé Martin en publiant son édition des Maximes de La Rochefoucauld, en 1822, avait bien