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et découvre tour à tour sur une grande étendue. A son extrémité s’élevaient les vieux bâtimens d’une ancienne résidence seigneuriale transformés en usine, puis en magasins et définitivement abandonnés.

M. Pallu les couvait depuis longtemps des yeux, lorsque l’occasion de les acquérir se présenta. Il la saisit avec empressement et n’hésita pas à acheter la propriété à ses frais, avec cette confiance dans l’avenir qui soutient tous les fondateurs et qui n’est pas toujours trompée. La générosité de Mme Furtado-Heine vint à point pour lui permettre de commencer la transformation. En faisant, au futur hôpital de Pen-Bron, ce présent magnifique, elle y avait mis pour condition qu’il appartiendrait à l’Œuvre nationale des hôpitaux marins, qu’il était question de créer ; mais cette clause n’a pas pu, malgré le vit désir de M. Pallu, recevoir son exécution, et l’établissement est devenu la propriété d’une société composée de dix membres qui, après avoir justifié de sa situation financière, a reçu l’autorisation administrative, par un arrêté du préfet de la Loire-Inférieure, en date du 24 mai 1888. L’Œuvre des hôpitaux marins lui a fait l’abandon de 40,000 francs, sur les 150,000 qui lui ont été alloués par le ministère de l’intérieur, et continue à lui donner l’appui moral qu’elle accorde à toutes les entreprises en vue desquelles elle s’est fondée.

L’hôpital de Pen-Bron s’élève au bout de la jetée, sur un petit môle qui dépasse de 5 à 6 mètres le niveau de la haute mer. Entouré d’eau de toutes parts, comme un navire, il élève au-dessus des flots sa silhouette rajeunie ; devant sa façade, on a tracé un petit jardin, et malgré la brise du large, les fleurs y poussent au milieu du sable. Il est abrité des vents froids du nord et de l’est par les collines de Guérande et n’est battu que par les vents du sud-ouest. Ceux-là soufflent pendant une grande partie de l’année, mais ils sont doux, humides et attiédis par les vapeurs du gulf-stream. En somme, l’emplacement est admirablement choisi, et M. Pallu a eu la main heureuse.

Les bâtimens forment un quadrilatère allongé, renfermant une cour intérieure. Ils ont été aménagés d’une façon ingénieuse et économique tout à la fois. On a pu y installer toutes les dépendances nécessaires à un établissement de cette espèce ; mais il faut convenir que, si son aspect ne ressemble en rien à celui d’un hôpital, ses dispositions intérieures ne remplissent pas non plus toutes les conditions réclamées par l’hygiène contemporaine. En somme, ces desiderata sont peu de chose, et la salubrité y est assurée par les vents de mer qui n’y soufflent que trop fort. L’établissement ne contenait, dans le principe, que 70 enfans ; mais on