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et il a donné les meilleurs résultats. Il est hygiénique et confortable. Depuis plus de trente ans qu’il existe, on n’y a jamais signalé une épidémie, malgré la présence de tant d’enfans qui, par leur âge et leur état de santé, semblent prédisposés aux maladies contagieuses. Les neuf dixièmes des malades qui y ont été admis ont vu leur santé s’améliorer et les deux tiers en sont sortis guéris.

Ce magnifique succès fut mis en relief, en 1866, par le docteur Bergeron dans le rapport dont j’ai déjà parlé. Tardieu, s’appuyant sur ce document qui fait époque dans le traitement marin de la scrofule, décida le conseil général de la Seine à faire construire, sur le même point, un grand hôpital qui fut inauguré le 18 juillet 1869. Construit pour 500 enfans, il peut en contenir 600 et, comme le nombre des lits du petit hôpital a été porté à 150, on peut recevoir 734 malades qui, joints au personnel en santé, font monter la population de l’établissement de Berck à 880 personnes.

Le nouvel édifice est tout en briques, avec perrons et appuis de fenêtre en pierres de taille. Il est décoratif et monumental ; mais il ne vaut pas mieux, au point de vue de l’hygiène, que le petit établissement primitif qu’il domine de toute sa hauteur et qu’il semble écraser de sa masse. Il a coûté 3 millions. Tous les hygiénistes ont blâmé ce luxe de construction, et les ingénieurs qui l’ont bâti regrettent de l’avoir placé si près de la mer. Dans les grandes marées et par les coups de vent d’ouest, elle vient se briser contre les assises du monument, elle en mine les fondations et les affouille de telle sorte qu’il a déjà fallu les étayer.

En dépit de ces critiques, l’établissement de Berck-sur-Mer a donné de bons résultats, et l’Assistance publique de Paris, loin de regretter les millions qu’il lui a coûtés, a songé plus d’une fois à l’accroître. En 1887, le conseil municipal chargea sa huitième commission de lui présenter un projet pour la création d’un nouvel hôpital maritime. Celle-ci lui proposa de construire à Berck une annexe contenant 366 lits. Cette ouverture rencontra de l’opposition dans le sein du conseil. Quelques-uns de ses membres firent observer que l’établissement de Berck est situé sur une plage d’un aspect désolé, sans végétation, battue par les vents d’ouest comme toutes celles de la Manche, et qu’il serait possible de trouver ailleurs un site plus hospitalier et convenant mieux à des enfans malades. A la suite d’une longue discussion, l’affaire fut renvoyée à la même commission, pour un nouvel examen, et elle en est restée là.

La plage de Berck n’est plus déserte, comme au temps de Marianne toute seule. Elle est devenue le siège d’une véritable colonie hospitalière. On y voit d’abord les deux maisons de santé Cornu, l’une destinée au traitement des garçons, l’autre à celui des filles.