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Le myrte fut à la plus belle,
A la plus sage l’olivier ;
Le pin à la vieille Cybèle,
Mais à pas une l’oranger…

L’arbre heureux en qui la nature
Se plaît à montrer en tout temps
Les fleurs, les fruits et la verdure,
L’été, l’automne et le printemps,
Fut réservé pour apanage
A la beauté qui brillerait
Des plus doux charmes de tout âge,
Quand l’Olympe la trouverait…

Parmi ce qu’aux cieux on adore,
Une telle divinité
Ne s’étant point montrée encore,
L’arbre sans patronne est resté.
Mais il trouve aux bords de la Seine
Celle qui doit le protéger !
Blot, son destin vers vous l’entraîne ;
C’est pour vous qu’est fait l’oranger.


Le compliment, les lieux-communs, la médisance, la calomnie forment en général les quatre points cardinaux de la conversation, les quatre pierres angulaires sur lesquelles repose la vie de salon. Avec raison de l’Isle préfère le compliment, devenu au XVIIIe siècle un art, presque une science, poussé à un rare degré de perfection. Sont-ils nombreux aujourd’hui, les imitateurs de ce Voltaire qui écrivait aux hommes comme nous devrions parler aux femmes, qui réplique à Mme Suard, assurant qu’elle sait par cœur ses ouvrages : « Ils sont donc corrigés ; » de Brissac qui répond à Marie-Antoinette étonnée de la foule immense venue à sa rencontre quand elle fit son entrée dans Paris : « Madame, ce sont autant d’amoureux de votre personne ? » Portraits en vers et en prose, madrigaux écrits ou causés, tout aboutit à cet art de plaire dont les règles n’ont jamais été si délicatement observées.

On veut donc plaire, se plaire à soi-même, plaire à tous, aux femmes, aux hommes, au public, même aux petites filles qui ont leur part de complimens, et voici comment le chevalier accompagne un envoi de mirabelles de Metz à Tune de ces délicieuses personnes.


Perrette, vous avez six ans
Et les goûts de cet heureux âge.
Le bonbon doit être un hommage
Pour vous au-dessus de l’encens.