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Comme correctif à la détaxe projetée du représentant Mac-Kinley, le sénateur Paddok, de l’État de Nébraska, préoccupé de ramener le vote des ruraux au parti républicain, a introduit le 22 mars dernier au Sénat, avec approbation du comité d’agriculture, un bill supplémentaire ayant pour but d’allouer un dollar de prime, à charge du trésor fédéral, à chaque tonne de sucre de betterave qui sera produite et manufacturée aux États-Unis, et cela jusqu’en décembre 1893 : de plus, libre entrée, en franchise de droits, pour toutes machines sucrières et graines de betteraves qui seront importées aux États-Unis jusqu’au 1er juillet 1893. Les primes allouées par le trésor seraient prélevées sur les recettes du cent payé par le sucre importé : telle est la dernière phase de la question sucrière au-delà de l’Atlantique.

La culture du lin et du chanvre, très circonscrite d’ailleurs dans quelques États, est encore dans l’enfance. Pour le premier textile, le fermier en brûle la tige et n’en récolte que la graine. Quant au chanvre, rouissage et battage sont des pratiques qui lui répugnent. Le farmer américain, qui rêve toujours grand, a horreur de cette petite culture qui ne trouve grâce que devant la fermière, quand elle sait filer.

Les plantations de tabac, dont la qualité reste encore inférieure, sauf en Virginie, viennent d’être aussi encouragées par la proposition faite au congrès de supprimer les droits intérieurs dont le planteur est frappé : ce sera une diminution de recettes de 12 millions de dollars pour l’Internal Revenue : les droits sur les tabacs étrangers seraient surélevés du même coup. Le législateur espère, par cette double mesure, stimuler le zèle des planteurs. Une grande société a acquis récemment de l’état de Floride 400,000 hectares de terrain marécageux qu’elle a assainis par un intelligent drainage, et où ses premiers essais dans la culture du tabac, comme du sucre et des légumes, ont donné d’excellens résultats. Le terrain a coûté 1 million de francs, et le drainage 5 millions de francs. L’acre, payé sur le pied d’un franc vingt centimes, a acquis une valeur qui varie de 5 à 40 dollars, grâce à la direction très intelligente de la maison Hamilton Desston de Philadelphie, qui s’est mise à la tête de cette immense opération.

Restent les fruits. Malgré l’excellence du climat et du sol, la production en est presque nulle. Sauf chez quelques immigrans français et allemands, le jardinage est absolument délaissé. Les États-Unis reçoivent de la Californie, par la voie ferrée, certaines primeurs de table, et restent tributaires de l’étranger pour les oranges, les citrons et surtout les bananes, dont la consommation journalière est excessive chez les classes inférieures. L’importation annuelle des deux premiers fruits s’élève à 4,800,000 dollars : aussi