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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet.

Puisqu’il faut des jeux et des fêtes, comme il faut, dit-on, de la tragédie pour le peuple ; puisqu’il est convenu qu’à des jours déterminés et fériés, qui varient d’ailleurs avec les régimes, la plus spirituelle des nations a besoin de voir des drapeaux aux fenêtres, une revue à Longchamp, des cordons de feu autour des palais publics, des bals dans les carrefours, soit, c’est fait ! C’est un 14 juillet de plus. La fête a été chômée et elle a vite passé. Elle n’a eu, à vrai dire, rien de particulièrement nouveau, en dépit de la commémoration séculaire de la Fédération ; elle a même gardé une légère teinte banale de fête de calendrier officiel. La ville a vu défiler les bataillons territoriaux qu’on lui avait promis et se déployer les escadrons ; elle a eu sa journée de congé et de liberté, ses jeux publics, ses spectacles gratuits, ses bals populaires, ses illuminations. Tout s’est passé selon le programme, avec moins d’imprévu et d’originalité qu’il y a dix ans. Puis les feux se sont éteints ; le rideau est tombé sur la représentation d’un jour, et il a bien fallu, le lendemain, revenir aux affaires, aux tracas, aux débats de parlement, aux interpellations sur la promotion de M. le général Brugère et sur les sardinières, au budget, aux confusions financières, — à la réalité. Voilà qui ne ressemble pas à une fête et qui prouve que si les feux d’artifice passent, les embarras restent pour les ministères, pour les parlemens, — surtout pour le pays, toujours appelé à payer les fautes de ceux qui le gouvernent, aussi bien que les spectacles dont on l’amuse !

Le fait est que, depuis quelques jours, chambres et gouvernement sont entrés dans une phase où ils ne peuvent plus se reconnaître, où ils sont exposés à finir la session par un aveu d’impuissance, peut-être pour avoir voulu trop entreprendre ou pour avoir tout entrepris sans ordre et sans prévoyance. Ils sont, pour le moment, en pleine confusion, en pleine obscurité, ne sachant plus ce qui sortira de leurs