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chars de guerre, ils répondaient par leur éternel refrain : « Ceux-ci espèrent dans les chevaux, ceux-là dans les chars ; nous, nous espérons dans le nom de Iahvé. »

Quand la terreur était trop forte, de courts oracles circulaient, annonçant que Iahvé avait résolu de détruire l’armée d’Assyrie en Palestine même.


IAHVE A JURE CECI :
Oui, ce que j’ai résolu arrivera,
Ce que j’ai décrété s’accomplira.
J’écraserai Assur en ma terre,
Sur mes montagnes je le broierai.
Et son joug disparaîtra de dessus les hommes,
Son fardeau de dessus leur épaule.
Voilà le décret décrété sur toute la terre,
Voilà la main étendue sur toutes les nations.
Quand Iahvé Sebaoth a décrété, qui peut empêcher ?
Sa main étendue, qui peut la ramener ?


Les manifestes — nous dirions aujourd’hui les articles — d’Isaïe à ce moment solennel, se succèdent de jour en jour. Chose incroyable. Il ne semble pas le moins du monde affecté d’un état de choses dont il était en partie la cause. « Qu’as-tu donc à monter sur les toits, ville tumultueuse, bruyante, toujours agitée ? » Il ne reproche aux malheureux Hiérosolymites que de ne pas assez jeûner et pleurer. De toute la tribu de Juda, on s’entasse à Jérusalem. Cela ne sauvera personne ; tous seront pris ensemble. Élam, Qir (les provinces les plus éloignées de l’Assyrie) approchent. La cavalerie s’établit aux portes, le siège va commencer.


Et ce jour-là, vous irez inspecter l’arsenal du palais de la Forêt, et vous constaterez les nombreuses brèches de la Ville de David, et vous emmagasinerez les eaux de la Piscine inférieure, et vous ferez le recensement des maisons de Jérusalem, et vous abattrez des maisons pour fortifier la muraille, et vous ferez un réservoir entre deux murs pour les eaux de la Vieille piscine, et vous n’aurez pas d’yeux pour celui qui est cause de tout cela, et vous ne saurez pas reconnaître celui qui a préparé de loin ces catastrophes. En ce jour-là, ce à quoi le Seigneur Iahvé Sebaoth vous appelle, c’est à pleurer, à vous lamenter, à vous raser la tête, à ceindre le saq. Or voilà que, chez vous, tout est plaisir, réjouissance, tuerie de bœufs, égorgement de moutons, mangerie de viande, beuverie de vin. « Mangeons et buvons, dites-vous, car demain nous mourrons. » Mais l’arrêt de Iahvé nous a été