Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 100.djvu/483

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’arrêter à cette considération subtile que le ministère conservateur ne serait pas aujourd’hui le résultat d’une manifestation d’opinion, d’un vote parlementaire. Le ministère libéral de M. Sagasta, à l’origine, n’est pas né, lui non plus, d’un mouvement de majorité, d’un vote du parlement ; il naissait d’une situation, d’une nécessité de circonstance, comme le ministère conservateur maintenant naît à son tour d’une situation nouvelle. L’unique question est de savoir ce que fera ce nouveau cabinet, dont le chef naturel est un des premiers hommes publics de l’Espagne et de l’Europe, M. Canovas del Castillo.

Ce serait sans doute se méprendre étrangement que de supposer des préméditations, des calculs de réaction à ce ministère qui vient de se former à Madrid. Depuis quelque temps déjà, les principaux chefs conservateurs, M. Francisco Silvela, qui est aujourd’hui ministre de l’intérieur, M. Canovas del Castillo, n’ont cessé de se défendre de toute velléité de réaction ; récemment encore ils déclaraient tout haut que, s’ils arrivaient au pouvoir, ils n’auraient d’autre pensée que de respecter et d’appliquer loyalement les lois libérales proposées par le dernier cabinet et votées par le parlement. D’un autre côté, la composition même du nouveau ministère prouverait que M. Canovas del Castillo n’a mis dans le choix de ses collaborateurs aucune arrière-pensée exclusive et réactionnaire. À côté de quelques-uns de ses anciens amis comme M. Silvela, M. Cos-Gayon, M. Villaverde, il a placé, — au ministère des affaires étrangères le duc de Tetuan, qui naguère encore était de la majorité libérale de M. Sagasta, au ministère de la marine l’amiral Beranger, qui a été ministre pendant la révolution et acompte parmi les libéraux. Ce n’est donc pas un ministère de combat, c’est plutôt un ministère de conciliation conservatrice qui vient de se former à Madrid. M. Canovas del Castillo est un esprit trop élevé, trop ouvert pour n’être pas le premier à comprendre que ce n’est pas l’heure des réactions, que la meilleure des politiques pour l’Espagne est celle qui lui assurera les garanties libérales avec l’ordre dans les affaires intérieures, une libre et indépendante neutralité dans les affaires de l’Europe.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

La première quinzaine de juillet a été mauvaise pour la généralité des fonds étrangers. Nos fonds nationaux ont été mieux traités, en dépit de toutes les exagérations commises en hausse pendant les deux mois précédens.