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Grenoble, ville bien située et bien fortifiée, était le siège du parlement et le lieu de réunion des états provinciaux. Vienne avait un archevêque qui se disait le primat du primat des Gaules. Montmélian, le fort Barraux, récemment reconstruit par Lesdiguières, Embrun, Briançon, haut perché dans la montagne, étaient les places fortes de la région. A Valence, sur le Rhône, existait un péage qui faisait le désespoir des commerçans et dont tout le profit allait au duc de Lesdiguières. Enfin, avant de quitter la province, on ne manquait pas de visiter la Grande-Chartreuse qui attirait les étrangers par sa situation au milieu du site le plus sauvage et par le renom d’hospitalité des bons pères.

Voici comment notre excellent Gölnitz entonne les louanges de la ville de Lyon. « Cette ville est la principale et le boulevard de la France, la première de toutes les Gaules au point de vue spirituel, la boutique du commerce universel et enfin, — ce qui est à son éternelle louange, — s’il y a au monde un endroit où se trouvent rassemblés tous les vénérables débris de l’antiquité, statues de dieux et de princes, inscriptions, tombeaux, théâtres en ruines, bains, thermes, aqueducs, canaux, égouts, temples, colonnes de toutes formes, obélisques, pyramides, tableaux, vases, urnes, lampes, emblèmes, poteries, — cet endroit, c’est Lyon. »

Monté sur ce ton, le dithyrambe ne s’arrête pas. Pour rehausser la gloire de Lyon, on attribuait sa fondation à un certain Lugdus, roi des Celtes, qui vivait l’an du monde 2335, « longtemps avant la naissance de Moïse. » Par cette antiquité fabuleuse, par son passé romain, par son admirable situation et par l’activité de son commerce, Lyon prenait aux yeux des étrangers une importance exceptionnelle. Que l’on vînt d’Italie ou que l’on vînt d’Allemagne, c’était toujours l’indispensable étape. C’était dans cette ville que se faisait le commerce de l’argent. Sa place était peut-être la plus importante du monde. On disait, vers le milieu du XVIe siècle, que Lyon était « comme une Florence ultramontaine. » On eût pu ajouter qu’elle était comme un Francfort français. C’était, au plus haut degré, la ville des affaires et de l’activité cosmopolite.

L’espace occupé par Lyon était immense. Sa muraille enveloppait de vastes terrains dont une partie en culture et en jardins. Pour pénétrer jusque dans la cité, il fallait passer successivement par trois portes. A la troisième, un portier demandait d’où l’on était, et ce que l’on venait faire dans la ville. Il donnait ensuite un billet, sans lequel on n’aurait été admis dans aucun hôtel.

Trois châteaux : Pierre-Encise, Saint-Sébastien et Sainte-Claire