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LA

FRANCE EN 1614[1]

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La superficie du territoire de la France, en 1614, représentait environ les quatre cinquièmes de ce qu’elle est aujourd’hui. Il lui manquait, à l’est, une bande comprenant l’Artois et les Flandres, la Lorraine et l’Alsace, la Franche-Comté, la Savoie et Nice ; il lui manquait, au sud, le Roussillon, et, dans la Méditerranée, la Corse. A l’intérieur, plusieurs petites principautés, dont la plus importante était le comtat d’Avignon, restaient indépendantes.

Les Français d’alors avaient conscience que leur pays n’avait pas atteint son entier développement et qu’il était en voie de formation ; au fond de leur cœur résidait le sentiment historique que les limites de la France doivent être celles de l’ancienne Gaule :

Quand Paris boira le Rhin
Toute la Gaule aura sa fin,
  1. Il serait superflu de citer ici en notes les témoignages contemporains sur lesquels s’appuie ce que la description de la France en 1614 peut contenir de nouveau. Qu’il suffise de dire qu’on a fait grand usage des récits des voyageurs, de Thou, Abr. Gölnitz, Jod. Sincerus, Th. Coryate, Jouvin de Rochefort, les ambassadeurs vénitiens, le Voyage de France par de Varennes ; des livres des géographes, Papirius Masson, Merula, Pontanus, André Duchesne, François des Rues, J. Le Clerc. On a toujours eu sous les yeux les recueils d’estampes, ceux de Chatillon, de Chiquet, d’Israël, de Perelle, les séries d’Abraham Bosse, Callot, Délia Bella ; on a cru devoir emprunter plus d’un trait aux proverbes qui condensent en quelques mots l’expérience populaire. Enfin on pourrait citer nombre de monographies locales, d’histoires des provinces et de livres modernes ; il faut du moins mentionner le livre de M. Babeau, les Voyageurs en France depuis la renaissance jusqu’à la révolution, et l’ouvrage de Al. le vicomte G. d’Avenel, Richelieu et la Monarchie absolue.