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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 octobre.

A mesure qu’on s’éloigne des élections dernières, expression souveraine des sentimens, des instincts ou des vœux du pays, et qu’on approche du jour où se réunira l’assemblée sortie de ce scrutin, il y n visiblement un effort pour dégager la vérité, la moralité de cette grande manifestation publique. Comme après toutes les batailles électorales, on cherche à se reconnaître entre vainqueurs et vaincus, les uns et les autres interprétant à leur façon leur victoire ou leur défaite, au demeurant des résultats encore indistincts.

On tâtonne, c’est bien clair, on se sent sur un terrain nouveau, au milieu de contradictions de toute sorte. On regarde du côté du ministère, dont on ne connaît pas encore les intentions définitives, et du côté de ceux qui ont de l’autorité par leur parole ou par leurs conseils, qui peuvent avoir une influence sur la direction des affaires publiques. On interroge, on recherche ou l’on écoute les confidences ; on veut savoir ce que pense M. Léon Say d’une situation où il a accepté de prendre un rôle le jour où il a quitté le sénat pour aller relever dans les Pyrénées le drapeau de la république modérée. On veut avoir l’opinion de M. Henri Germain, qui ne se fait faute de répondre aussi simplement que possible aux questions qu’on lui adresse. M. Ribot, lui, sans être interrogé, se hâte de donner dans un banquet sa consultation, une consultation peut être assez prématurée, qui pourrait être compromettante si elle n’est pas inutile. Puis viennent les journaux, s’emparant de l’opinion de M. Léon Say, de l’opinion de M. Henri Germain, du discours de M. Ribot, brouillant tout, ravivant les vieilles querelles, remettant en scène l’opportunisme, le radicalisme, le centre gauche, j& concentration, la réaction, le cléricalisme. Tant il y a qu’après toutes les explications, les conversations ou les polémiques, on en vient à ne plus s’entendre, et que plus on s’éloigne des élections, plus on semble en obscurcir le caractère et la portée. A la veille du scrutin de septembre, on a vécu