Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 95.djvu/858

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pays riche et fertile, contenant une population de 664,000 habitans, le San-Salvador importe pour environ 17 millions de produits manufacturés et exporte pour 26 millions de café, d’indigo, d’or, d’argent, de sucre, de tabac, à destination de l’Amérique centrale, du Pérou, du Chili, des États-Unis, de l’Angleterre et de la France. Ce mouvement commercial s’accroît chaque année.

Le pavillon de San-Salvador, construit sur la terrasse des Arts libéraux, reproduit assez exactement le style des habitations locales, un curieux mélange d’architecture espagnole et arabe. Des paysages empruntés aux sites les plus célèbres, entre autres la vallée de Molineros, située au pied du volcan de San-Vicenti, ornent les murs. À l’intérieur, on admire surtout une magnifique collection de minerais d’or, d’argent et de cuivre et des bois d’ébénisterie très remarquables.

Pays de lacs et de forêts, de merveilleuses essences végétales et de plantes exotiques, Nicaragua élève au milieu du Champ de Mars une riante oasis, une construction élégante et gracieuse, à la toiture écaillée de tuiles émaillées, couronnée d’épis en terre cuite du plus original effet, décorée, à l’intérieur, de nattes et de tissus aux couleurs brillantes. Dès l’entrée, ce qui attire et retient les yeux, c’est le plan du canal interocéanique que les États-Unis se proposent de creuser entre l’Atlantique et le Pacifique au travers du laide Nicaragua. Avec la persévérance qui leur est propre, depuis quarante années, ils poursuivent ce projet, l’étudient et le mûrissent. Projet gigantesque, à tout prendre réalisable, à demi réalisé par Cornélius Vanderbilt, qui, en 1850, établit par le transit du lac de Nicaragua sa ligne de communication entre New-York et San-Francisco, idée reprise ensuite par l’aventurier Walker, qui, en 1855, envahit le Nicaragua à la tête d’une bande de flibustiers, un moment en fut maître, le perdit pour le ressaisir de nouveau, et, enfin repoussé, tourna ses armes contre le Honduras, et, vaincu, mourut fusillé à Truxillo, le 11 août 1860.

Si le gouvernement des États-Unis s’abstint alors d’intervenir en faveur d’un soldat d’aventure, désavoué par lui, si depuis il a toujours répudié toute pensée d’agression contre une république sœur et découragé par son attitude ceux qui, devançant les événemens, aspiraient à marcher sur les traces de Walker, en revanche il a toujours favorisé les démarches faites auprès du Nicaragua en vue du percement de l’isthme. Le plan exposé est le résultat des incessans efforts des Américains pour ouvrir une communication entre les deux océans. Les négociations ont abouti, les ingénieurs sont à l’œuvre, les devis établis, et les capitaux ne semblent pas devoir faire défaut à une entreprise qui, du même coup, ferait la fortune de ce pays riche et peuplé.