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s’accrut même d’année en année en proportion des services rendus, si bien qu’une fois arrivé au terme de son mandat, Lethière fut invité à continuer ses fonctions pendant quatre ans encore. Il se trouvait donc en 1814 à la tête de l’Académie de France, lorsque la double nouvelle de la chute de Napoléon et de la restauration des Bourbons parvint à Home, où elle provoqua, tant parmi les pensionnaires que dans la population même, d’ardens mouvemens d’opinion en sens contraire. Le directeur eut à la fois assez de bon sens pour éviter de se mêler personnellement à la lutte et assez d’autorité pour accomplir, malgré les essais d’opposition, son devoir. Grâce à lui, le calme fut maintenu aux abords conjure à l’intérieur de la villa Médicis, et le drapeau qui consacrait le changement survenu dans le gouvernement de notre pays put surmonter l’entrée d’un palais appartenant à la France, sans que personne désormais osât faire mine de s’en scandaliser ; mais quand, au bout de quelques mois, une nouvelle révolution eut jeté bas ce qui venait d’être rétabli, et rétabli ce qui avait été naguère renversé, Lethière dut redoubler de fermeté et de prudence pour faire accepter à Rome les conséquences de ce revirement subit, sans compromettre la dignité du pays qu’il représentait et sans paraître avoir cédé trop tôt aux exigences de la situation que les événemens lui avaient faite. Aussi se montra-t-il cette fois moins empressé qu’il ne l’avait été l’année précédente à prendre officiellement les mesures imposées par le nouvel ordre de choses.

« L’an passé, écrivait-il, le 14 avril 1815, au président de la quatrième classe, je me suis trouvé ici dans une position difficile dont la classe fut instruite, et j’ai su qu’elle avait approuvé ma conduite. Le ministre de l’intérieur m’en a également témoigné sa satisfaction. En dernier lieu, nous n’avons été instruits de ce qui se passait en France que par la voix publique et par des articles de journaux italiens souvent mensongers et contradictoires… Il y avait plus de trois semaines qu’il n’arrivait ici ni lettres ni journaux de Paris. Ils arrivèrent enfin le 11 du courant, et, la nouvelle du retour de l’empereur étant par là tout à fait notoire, je fis supprimer les armoiries royales à l’entrée du palais de l’Académie. Je ne m’étais point jusqu’à ce moment rendu aux sollicitations qui m’avaient déjà été faites par plusieurs Français… Mon devoir était d’attendre l’arrivée des journaux de France, ne fût-ce que pour être en règle vis-à-vis du gouvernement romain, très susceptible dans ces sortes d’affaires ; mais j’attendrai les instructions du ministre à qui je rends compte de ces détails pour faire replacer les armes de l’empire.

« Cette suppression des armoiries royales a fait l’entretien de