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terrestre ; — vivant à l’air libre, sous un ciel clément, exempt de saisons extrêmes, n’ayant devant lui aucun obstacle physique trop puissant, placé au bord de cours d’eau poissonneux, sur des plages fréquentées par toutes sortes d’animaux, l’homme de cet âge a dû passer des jours heureux dans des cabanes de bois léger, à peine couvert et gouverné par ses instincts de chasse qui sans doute le portaient à entreprendre tantôt au nord, tantôt vers le sud, des excursions combinées d’après l’ordre des saisons et les chances favorables à l’existence qu’il avait adoptée. Cette vie précaire dans un sens, mais libre, mouvementée, soumise à l’imprévu et non exempte d’entraînement, ni de cet amour de l’inconnu, de cette soif d’aventures propres à façonner l’intelligence, était bien faite pour ouvrir à l’homme des perspectives nouvelles, en sollicitant ses efforts en vue de l’avenir.

Nous terminerions ici un résumé déjà long, en renvoyant au livre de M. Falsan le lecteur curieux d’en savoir davantage, si M. Faye, dont nous avons exposé les vues cosmogoniques, n’avait pris soin de leur donner un complément, en les appliquant à la période glaciaire, dans une note récente, communiquée par lui à l’Académie des Sciences[1]. L’analyse de cette note servira de conclusion à nos idées interprétatives sur la période glaciaire et les causes générales dont elle a dû relever. — Remontant à la plus éloignée, mais à la plus effective de ces causes, comme aussi à la plus permanente, M. Faye la rencontre dans cette donnée géogénique, formulée par lui, et consistant à admettre que, sous les mers, à toutes les époques, le refroidissement du globe va plus vite et plus profondément que sur les continens. Admettons un instant, avec lui, cette supposition qui n’a rien par elle-même que de fort vraisemblable, et tout le reste s’en déduira comme par enchantement, puisque du même coup nous aurons obtenu des corollaires d’une importance décisive : d’abord, l’étendue continentale cédant plus facilement que le fond des mers, par suite d’une moindre consolidation, aux efforts de l’intérieur, les accidens orogéniques se trouveront plus prononcés et iront en croissant, c’est-à-dire qu’ils se traduiront à la surface des continens par des montagnes de plus en plus élevées, de mieux en mieux disposées pour donner naissance à des champs de névé, et cela dans la mesure même de la densité croissante des portions correspondant au fond des mers. Or il est parfaitement exact que cette consolidation relative, et, par elle, les effets qu’elle était destinée à produire, se seront accentués par le fait même des progrès du refroidissement des eaux, et, d’autre

  1. Séance du 19 août 1889, comptes-rendus, t. CIX, p. 287-290.