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conséquence leur palais délabré du Corso[1] pour aller s’établir dans cette incomparable villa Médicis dont tous ceux qui s’y sont succédé depuis cette époque ont gardé ou gardent encore un si cher souvenir, et comme la vision toujours présente au milieu des vicissitudes de leur vie.

La nouvelle classe des beaux-arts avait d’ailleurs provoqué ou réalisé d’autres progrès, pris ou fait prendre d’autres décisions aussi profitables aux études qui se poursuivaient ai l’Académie de France, à Rome, qu’a la discipline intérieure ou à l’autorité de la compagnie elle-même. Elle avait ajouté aux obligations que les pensionnaires architectes avaient eu jusqu’alors à remplir celle d’exécuter, pendant les deux dernières années de leur séjour en Italie : « 1o la Restauration d’un édifice ou monument antique ; 2o un projet de monument ou d’édifice de leur invention applicable à la France. » De ces deux prescriptions la première seulement a été maintenue jusqu’à nos jours ; mais si, pour des motifs qu’il serait peut-être inutile de rapporter ici, l’Académie a cru devoir modifier sur le second point le règlement qu’elle avait édictée la tradition fondée par elle au commencement de ce siècle n’en a pas moins été invariablement féconde en ce qui concerne les travaux de restauration : Lorsqu’on examine à la bibliothèque de l’Ecole des beaux-arts la belle série de ces travaux où la sagacité archéologie)ne et l’érudition de nos jeunes architectes se manifestent avec la même évidence que les efforts de leur imagination personnelle ou que l’habileté déjà sûre de leur main, on comprend de reste l’utilité de la mesure prise, dès les premiers jours de sa réorganisation, par la classe des beaux-arts[2] et l’heureuse influence qu’a pu exercer ce régime de fortes études sur l’avenir des talens qui, d’abord, y avaient été soumis. À de bien rares exceptions près, tous les architectes qui ont honoré l’école française dans notre siècle, depuis Huyot jusqu’à Duban et depuis celui-ci jusqu’aux architectes aujourd’hui membres de l’Institut, tous ont été pensionnaires de l’Académie de France et, par conséquent, se sont acquittés chacun à leur tour des tâches dont il est question ici : croit-on que, s’ils n’avaient pas eu à les remplir, le talent dont ils ont fait preuve

  1. A l’angle du Corso et de la via-Lata. Avant d’être installée en 1725 dans ce palais dit de Nevers ou palais Mancini, l’Académie de France occupait une partie du palais Capranica, aujourd’hui transformé en théâtre.
  2. Antérieurement à cette époque, il est vrai, plusieurs des jeunes architectes que le roi pensionnait à Rome avaient envoyé des restaurations. Ainsi Percier, qui avait remporté le prix cm 17.S0, fit pour son envoi de dernière année une Restauration de la colonne Trajane ; mais des travaux de ce genre n’étaient pas absolument obligatoires. Ils ne le devenaient pour les pensionnaires que dans le cas, — et ce fut précisément ce qui eut lieu pour Percier ; — où l’Académie d’architecture elle-même avait désigné le monument qu’il s’agissait de restituer.