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commencement de l’année 1800[1], les premiers secrets arrachés à la terre et aux monumens des Pharaons ; elle recueillait les élémens du grand ouvrage qui, sous le titre de Description de l’Egypte, devait, en attendant les découvertes décisives de Champollion et les travaux complémentaires de ses successeurs, mettre sous les yeux du public un ensemble de renseignemens aussi précieux qu’imprévus sur « l’état ancien » et sur « l’état moderne » du pays qu’elle avait reçu la mission d’explorer. Enfin, une sorte d’annexé de l’Institut de France, l’Institut, du Caire, fondé le 20 août 1798, réunissait des savans, des lettrés, des artistes, les uns déjà membres de l’Institut national, les autres simplement attachés à la commission qui avait suivi l’armée, tous soumis à la même obligation de communiquer régulièrement leurs travaux à leurs confrères de France et de répondre, par l’envoi de mémoires développés, aux questions que ceux-ci jugeraient à propos de leur adresser sur quelque point d’histoire, de science ou d’archéologie.

Les deux premières classes de l’Institut national s’empressèrent d’user du droit qui leur était ainsi conféré. Une correspondance active s’établit entre les commissaires désignés par ces deux classes et les membres de l’Institut du Caire appartenant aux sections de physique et d’économie politique[2] ; il ne paraît pas, toutefois, que les membres de la troisième classe aient été animés du même zèle ni stimulés par la même curiosité. Ils avaient bien chargé trois d’entre eux. antiquaires ou orientalistes de profession, — Dupuis, Mongez et Langlès, — de demander des informations sur quelques problèmes d’archéologie pure ou de linguistique ; mais ils semblaient par là s’être désintéressés des questions relatives à l’art proprement dit ou tout au moins avoir, volontairement ou non, laissé de ce côté péricliter leurs privilèges. Rien de plus explicable, d’ailleurs, que ce rôle un peu effacé des artistes membres de

  1. Cuvier, alors secrétaire de la première classe de l’Institut, adressait, le 23 février 1800, une lettre au général Bonaparte, devenu premier consul, pour le remercier, au nom de ses confrères, de l’envoi d’un exemplaire de ces Mémoires : « L’amour des sciences, lui écrivait-il, et le soin de les propager vous ont toujours occupé, même au sein des plus brillantes victoires, et l’Europe entière attendait les fruits qu’ils produiraient dans cette antique patrie des connaissances humaines que vous venez d’ajouter à vos conquêtes. C’est avec le plus vif intérêt que l’Institut national en a reçu les prémices.
  2. L’Institut du Caire était composé de trente-six membres et divise en quatre sections : mathématiques, physique, économie politique, littérature et arts. Parseval-Grandmaison, le futur auteur d’un poème sur Philippe-Auguste, Denon, le très habile dessinateur Dutertre et le peintre de fleurs Redouté faisaient partie de cette dernière section qui comprenait en tout huit membres.