arbitres de la vie, les grands seigneurs de la justice, les maîtres des chefs porteurs d’ombrelles, ce qui veut dire tout simplement les rois de Birmanie, quand il y en avait encore. Le Birman passe invariablement par trois épreuves durant sa vie r une maladie de variole, un fort tatouage et un séjour plus ou moins long dans un monastère. Il ne doit pas entrer dans un couvent en qualité d’écolier seulement, — car les couvens sont les seules écoles du pays, — mais il doit y venir comme membre du clergé. Alors, il rase sa tête et porte la robe jaune des brahmines pendant un temps qui varie d’un jour à quatre mois. Il doit, pendant cette période, observer les règles de la loi religieuse, qui sont le renoncement aux choses de ce monde et l’obligation de mendier de porte en porte avec une besace sur l’échine. S’il s’y refusait, il serait considéré comme se mettant en dehors de l’humanité et au niveau de la brute. Tout le mal qu’il pourrait faire s’ajouterait à la somme de ses imperfections naturelles, et, lorsque l’heure de la transmigration des âmes sonnerait pour lui, aucune de ses bonnes actions ne lui serait comptée.
Le renoncement aux richesses est une des vertus les plus honorées en Birmanie, et les femmes s’agenouillent lorsqu’un moine mendiant et loqueteux se trouve sur leur passage. Si grande est cette vénération qu’on se sert d’un langage spécial et dont on n’userait même pas pour le souverain, lorsqu’on s’entretient des actions les plus simples, les plus naturelles d’un brahmine, telles que celles de manger, boire, dormir. La personne du grand-prêtre est tellement sacrée qu’aucune loi civile ne peut l’atteindre. Quand il meurt, son corps est embaumé, doré comme une statue, placé dans un riche cercueil et déposé en terre consacrée.
Il n’est donc pas de peuple plus pieux que les Birmans. Est-ce parce qu’ils ont reçu une forte éducation religieuse et fait partie des ordres sacrés ? On peut répondre qu’en Europe quelques-uns des plus ardens ennemis de la papauté et de la foi ont été des moines ou des écrivains élevés par des prêtres. Un brahmine ne peut tuer un être vivant, fût-ce un animal nuisible. Ce respect de la créature animée est d’ailleurs si profond, que des mères birmanes laissent fuir sans les écraser des serpens ou des scorpions qui ont mordu ou piqué mortellement leurs enfans. Les jours de prière sont mieux observés que ne l’est le dimanche en Angleterre, ce qui n’est certainement pas peu dire. Ces « jours de devoir, » comme on les appelle, attirent aux parvis des pagodes une foule immense, et l’on ne peut visiter un de ces temples sans y trouver quelques dévots récitant leurs prières. Le nombre des lieux saints est considérable ; il n’est pas un village qui n’ait le sien ; pas une colline