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de quelques nouveaux adhérens, ne tardèrent-ils pas à rédiger, sous le titre d’Adresse et projet de statuts et règlement pour l’Académie centrale de peinture, sculpture, gravure et architecture, une pétition à l’assemblée nationale dans laquelle ils indiquaient certaines modifications à apporter aux lois et aux usages académiques, sans exiger pour cela qu’il fût fait table rase des traditions et du régime anciennement établis. La substitution de la dénomination « d’Académie centrale » à celle « d’Académie royale » officiellement employée jusqu’alors, — l’adjonction aux membres dont la compagnie se composait des membres de l’Académie d’architecture qui depuis l’année 1671 formait une corporation isolée, la faculté pour les agréés d’assister aux séances et de prendre part aux discussions, — enfin l’augmentation du nombre des professeurs et des cours à l’école ouverte au Louvre et dont l’Académie avait la direction, — telles étaient les innovations principales soumises par les réclamans à l’examen de l’assemblée nationale.

Cependant, après avoir, au début des hostilités, affecté de ne pas s’émouvoir, la majorité de l’Académie commençait à sentir qu’il ne lui suffirait plus, pour décourager ses agresseurs, de garder cette attitude impassible. Elle avait bien pu, lors de la première levée de boucliers, refuser dédaigneusement le combat et arguer, en faveur d’une résistance tranquille et muette, du petit nombre de ceux-là mêmes qui prétendaient lui déclarer la guerre ; elle avait bien pu, pour toute réponse au mémoire présenté par treize séditieux, — sur plus de cent membres dont se composait alors la compagnie, — mentionner sans commentaire sur le registre des procès-verbaux, à la date du 5 septembre 1789, la communication de ce mémoire qu’elle se contentait de qualifier de « libelle ; » mais ce n’était plus assez maintenant du silence ou du dédain. Les accusations une fois rendues publiques et les démarches pour l’accomplissement d’une réforme une fois entamées auprès du pouvoir législatif, il fallait bien essayer ouvertement d’arrêter les unes et de prouver l’injustice des autres. C’est ce à quoi l’Académie se résolut en chargeant Renou, récemment élu secrétaire. de réfuter un à un les argumens produits contre elle.

Publié sous le titre d’Esprit des statuts et règlemens de l’Académie royale de peinture et de sculpture, pour sertir de réponse aux détracteurs de son régime, l’écrit de Renou, bien loin d’apaiser la querelle, ne lit au contraire que l’envenimer. Le langage, il est vrai, un peu plus hautain parfois que de raison, des membres de la compagnie mise en cause, — leur parti-pris de se refuser à la moindre modification des anciens statuts, — le défi, assez imprudemment jeté par eux à la jeunesse de se passer de leurs encouragemens, —