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perfectionner les sciences et les arts » et « à suivre les travaux scientifiques ayant pour objet l’utilité et la gloire de la république. » Comme ces deux classes aussi, elle devait se recruter au moyen d’élections faites par l’Institut tout entier ; participer à la rédaction du rapport annuellement adressé « aux représentans de la nation pour leur rendre compte des progrès accomplis dans les sciences, les lettres et les arts ; » concourir à toutes les publications, à tous les travaux dont l’Institut, était charge : par conséquent, s’absorber dans la vie commune, dans l’unité rigoureuse du corps auquel elle appartenait.

Ce fut à partir de 1803 seulement que, tout en restant indissolublement unie à l’ensemble constitué dès le début, elle commença d’avoir son rôle distinct et sa vie propre, de former une réunion d’artistes sans confusion ni partage avec les hommes de lettres et les savans ; en un mot, de redevenir à peu près, — sauf le nombre limité des membres appelés à la composer et la place faite parmi ceux-ci aux architectes et aux musiciens, — ce qu’avait été, dans les deux siècles précédons, l’Académie royale de peinture et de sculpture. Pour marquer cette analogie ou pour faire ressortir ces différences, il convient d’indiquer en quelques mots les origines et le rôle de la Compagnie que l’Académie des Beaux-Arts devait remplacer, et par là de rattacher l’histoire de celle-ci aux souvenirs de sa devancière.

On sait dans quelles circonstances et en vue de quelles réformes l’ancienne Académie royale avait été établie, au temps de la minorité de Louis XIV. Nous nous contenterons de rappeler que, jusqu’à cette époque, c’est-à-dire jusqu’à l’année 1648, rien n’avait encore sensiblement modifié les lois qui régissaient les artistes et les conditions en vertu desquelles ils se trouvaient, comme au temps des Valois, partagés en trois classes. La première, sous le nom de maîtrise, comprenait les maîtres-jurés, simples artisans pour la plupart, — doreurs, marbriers, peintres d’enseignes ou de bâtimens, — auxquels les lettres-patentes successives des rois avaient conféré le droit de monopole sur l’art aussi bien que sur le métier, en même temps qu’elles imposaient à quiconque aspirait à être reçu maître, par conséquent à exercer librement la profession de peintre ou de sculpteur, l’obligation d’un apprentissage dont la durée était fixée, sous la discipline d’un des membres de la communauté : après quoi l’aspirant devait encore, pendant quatre années consécutives, « servir et travailler, » sous cette même discipline, en qualité de « compagnon. »

La seconde classe, dite des brevetaires ou des privilégiés, se composait des artistes qui portaient le titre de peintres ou de