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sont enfermés, et l’accroissement de leur nombre y rend leur existence de plus en plus difficile. Pour vivre, ils auraient besoin qu’on leur ouvrit des pays où la demande pour le travail urbain et les professions bourgeoises fût plus considérable. Il y a, dans tout l’ouest, un excédent manifeste de commerçans, de petits boutiquiers, de petits artisans qui souvent font défaut dans le centre ou l’est de l’empire. Prenez une carte de Russie : dans la région où résident les juifs, les villes, en grande partie peuplées par eux, se pressent en bien plus grand nombre que dans les régions de l’empire qui leur sont fermées. Rien qu’à considérer les tableaux statistiques, il saute aux yeux qu’il y a là un manque d’équilibre, une répartition artificielle de la population urbaine, retenue dans les provinces de l’ouest par la loi, comme par une digue qui l’empêche de se répandre librement sur les contrées voisines. Pour rétablir le niveau, il faut ouvrir au trop-plein de la population juive de nouvelles régions.

La population chrétienne des provinces occidentales n’y est guère moins intéressée. L’empereur Alexandre III a nommé dans les gouvernemens de l’Ouest des commissions chargées d’étudier la question sémitique ; elles se sont prononcées, presque unanimement, pour l’extension, ou mieux, pour la suppression de la ligne d’habitation des juifs. Et comment en serait-il autrement ? Ces provinces sont saturées d’Israélites. On leur a fait entendre, presque officiellement, que les juifs n’étaient que des parasites, des sangsues ou des sauterelles dévastatrices ; elles sont naturellement peu satisfaites de leur avoir été livrées en pâture. En attachant les juifs aux flancs de provinces habitées par des Polonais, des Lithuaniens, des Lettons, des Roumains, des Petits ou des Blancs-Russiens, on dirait que la Russie leur a donné à dévorer les enfans qui lui sont le moins près du cœur.

Malgré tous les inconvéniens de cette accumulation de l’élément juif urbain sur une surface restreinte, il s’en faut, du reste, que l’ouest russe ait été entièrement ravagé et dénudé par ces locustes qui le rongent depuis des siècles. La terre y est encore verte et l’or des épis y reluit au soleil. Plusieurs de ces provinces, en Russie-Blanche notamment, ont beau être parmi les moins fertiles de l’empire, leur développement économique ne le cède pas, en général, à celui des contrées préservées du parasitisme Israélite. Loin de là, plusieurs de ces goubernies de l’ouest sont au premier Rang pour le développement industriel ou agricole, témoin le royaume de Pologne, qui, avec un sol médiocre, est devenu une des régions les plus riches de l’empire.

Contre l’ouverture de l’intérieur de la Russie aux Israélites peuvent