troisième et le quatrième tableau, le succès le plus éclatant. Ailleurs encore, c’est lui bien souvent qui chante, qui raconte, qui décrit. L’orchestre, plus que le récit de Phorcas, expose la pièce dans le prologue par des combinaisons de motifs tout allemandes ; au second tableau, dans une page d’ailleurs très belle, l’orchestre encore signale le passage des apparitions dans la lune cou su lire par Esclarmonde, les voix des deux femmes l’accompagnent au lieu d’en être accompagnées. Plus loin, dans le duo de Roland et de l’évêque, l’orchestre, toujours l’orchestre, soutient de son chant le dialogue déclamé, et, voyez la vanité des systèmes et le retour ironique des choses de l’art, ce passage rappelle un autre duo, assurément peu wagnérien, celui de Sparafucile et du bouffon au second acte de Rigoletto.
Enfin, M. Massenet a tâché de donner à son orchestre non-seulement le rôle, mais la couleur instrumentale de l’orchestre wagnérien. Il l’a de parti-pris alourdi et assombri, chargé de sonorités basses. Vous rappelez-vous, dans le Jack de M. Daudet, un chanteur usé qui voulait retrouver ses notes caverneuses d’autrefois ? — À ce moment, dit le romancier, Labassindre lit beuh ! — Dans Esclarmonde, trop d’instrumens, et trop souvent, contre-basson, clarinette basse, saxophone font comme Labassindre, et cela sans grand profit pour les effets fantastiques, j’entends les effets de puissance, car les autres, nous le verrons, ont été parfois rendus avec la grâce et la dextérité familières à M. Massenet.
Voilà beaucoup de Wagner. Est-ce heureux ? Je ne le crois pas. Il ne faut dire, en musique ou autrement, que des choses personnelles. M. Massenet avait, même dans Esclarmonde, à dire de ces choses-là : pourquoi les dire dans une langue qui n’est pas tout à fait la sienne et ne sera jamais que celle du maître qui l’a créée à son usage et surtout à sa taille ?
Une part ainsi faite aux critiques générales d’Esclarmonde, il en faut faire une autre aux éloges particuliers et pour ainsi dire locaux. Il va de soi qu’on n’entend pas sans y prendre parfois grand plaisir une partition de M. Massenet. On peut la discuter, la blâmer au besoin ; on ne la dédaigne et surtout on ne l’accable pas.
Le prologue, ainsi que nous le disions, est fait de quelques motifs principaux, sur lesquels se posent les phrases déclamées de l’empereur Phorcas. Il ne manque ni d’une certaine grandeur, ni d’une certaine aridité. Le second tableau représente une terrasse du Palais impérial. Esclarmonde lève à son chevalier, et sa rêverie commence, par une phrase d’un tour gracieux et tendre : Comme il tient ma pensée ! qui malheureusement faiblit trop vite. L’évocation aux esprits de. L’air, de l’onde et du feu est moins puissante que perçante. Le musicien abuse ici pour la première fois (ce ne sera pas la dernière) des notes