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tribunaux qu’un juge d’instruction et un substitut ? Un autre juge viendrait du chef-lieu de département, comme dans les county-court d’outre-Manche, présider chaque semaine les audiences, et serait assisté du juge d’instruction et d’un suppléant. Le juge d’instruction aurait droit de rendre les ordonnances sur requête et sur référé ; qui ne sait que, dès à présent, le président qui s’absente lui délègue sans inconvénient ce pouvoir ? L’état obtiendrait de ce chef une très notable diminution dans un budget qui a passé de 10 millions (chiffre de 1829) à 38 millions (chiffre de 1889).

Il en pourrait réaliser plusieurs autres dans les services de la chancellerie, infiniment trop concentrée et paperassière. De 1876 à 1888, le chapitre du « matériel et dépenses diverses de l’administration centrale » a passé de 88,000 francs à 130,000, c’est-à-dire qu’il a augmenté de près de moitié. Quant au personnel, nous sommes loin des quelques audienciers, contrôleurs, chauffe-cire et garde-minutes du chancelier de Louis XVI. De la fin du Directoire date la mise sur pied d’un personnel nombreux, la création de cette chose toute moderne, que l’on appelle le « ministère de la justice. » Le service de « l’envoi des lois, » inauguré à cette époque, comprenait déjà deux directeurs et trois chefs de bureau, dont l’existence se justifie aux yeux de la postérité, par ce motif que jamais on n’a fait plus de lois, que jamais par conséquent on n’en a défait davantage, et que jamais on n’en a moins exécuté qu’en ce temps-là. Avec Napoléon, ce ne furent plus seulement les magistrats qui se trouvèrent soumis à la férule du grand-juge, comme les officiers l’étaient au ministre de la guerre et les professeurs au grand-maître de l’université, ce furent les auxiliaires de la basoche à tous les degrés. Le grand-juge put, de son autorité privée, censurer un avocat, l’interdire, l’exclure et le rayer du tableau. Depuis cette époque les droits du garde des sceaux ont été réduits, bien que ses dépenses n’aient fait que s’accroître. La question d’argent toutefois n’est pas ici la principale ; la réforme à accomplir sera plus haute et plus vaste : elle ne consistera pas seulement à dépenser quelques millions de moins à l’hôtel de la place Vendôme, mais aussi à rendre la procédure plus simple, plus rapide et moins chère, à établir l’unité de juridiction, à laisser surtout une vie indépendante à ce troisième pouvoir de l’état, — le corps judiciaire, — qui devrait marcher de pair avec les deux autres, et que jusqu’à présent l’autorité exécutive tient emprisonné, depuis les premiers présidons jusqu’aux juges de paix, dans les cartons de son « personnel. »


Ve G. D’AVENEL.