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et de quelque importance ne seront possibles que lorsqu’on aura réorganisé les services publics en tenant compte des changemens que les chemins de fer et la télégraphie ont apportés dans les conditions d’existence de notre nation, Néanmoins, il y a encore une œuvre utile à faire, en réfrénant l’ardeur dépensière de certains départemens ministériels, les travaux publics, l’instruction publique, la marine et la guerre. À quoi aurait servi la suppression du budget extraordinaire, si on laisse le ministre des travaux publics accumuler emprunt sur emprunt, et rendre indéfiniment l’État débiteur des compagnies de chemins de fer, des départemens et des chambres de commerce ? Bientôt, le budget tout entier de son département sera absorbé par les annuités à servir aux prêteurs qu’il recrute un peu partout : nous ne sommes que l’écho de sénateurs républicains, de M. Hugot, de M. Loubet, de M. Boulanger, en insistant sur la nécessité de liquider définitivement le plan Freycinet, non plus en ajournant ou en retardant les travaux qui restent à faire, mais en en supprimant la plus grande partie.

Les rapporteurs du budget crient misère à l’envi les uns des autres ; mais ils trouvent toujours de l’argent pour le ministère de l’instruction publique, même pour des dépenses d’une utilité contestable. Quelle urgence y avait-il à acquérir l’hôtel de Chimay et à y dépenser en travaux d’appropriation des sommes suffisantes pour construire des bâtimens neufs ? Ne pouvait-on se contenter pendant quelques années encore des ateliers qui ont suffi pendant trois quarts de siècle à l’École des beaux-arts ? était-il indispensable d’y adjoindre, toute affaire cessante, de nouveaux ateliers ? On va dépenser, cette année, plus d’un demi-million pour installer des facultés de médecine à Lille et à Lyon : celle de Lille n’a qu’un objet, c’est de faire concurrence à la faculté libre qui est organisée depuis plusieurs années et qui est très prospère : n’eût-il pas mieux valu, s’il est nécessaire de multiplier les centres d’enseignement médical, employer à Bordeaux l’argent qu’on va dépenser à Lille ? La faculté de Lyon fera double emploi avec l’école de médecine militaire que le ministre de la guerre va installer dans la même ville et dont le besoin ne se faisait pas sentir. Cette création ne dispensera pas ce ministre, en cas de guerre, de faire appel aux services d’un très grand nombre de médecins et de chirurgiens civils. Où sera donc, pour l’État, l’avantage de caserner à Lyon une centaine de jeunes gens qui pourraient faire leurs études dans les facultés universitaires ? On augmente, cette année, de 877,000 fr. l’annuité destinée à gager des emprunts dont l’objet est de donner de nouvelles subventions aux communes pour les constructions scolaires. N’est-ce pas là un défi jeté à l’opinion publique, qui se prononce