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qui allait déployer la force du lion[1]. » Il n’est pas impossible qu’une tribu slave ait habité le Bas-Poitou et qu’elle y ait donné son nom à un cours d’eau ; mais, descendus ou non des vendes, les riverains de ce cours d’eau n’ont pris, collectivement, aucune part à l’insurrection vendéenne, et leur vaillance héréditaire n’a rien à y revendiquer.

Le nom de Vendée, comme nom de pays, a un mérite plus réel, auquel on ne pensa pas sans doute en le choisissant, mais que les événemens mirent bientôt en singulière évidence. Non-seulement c’est l’un des plus harmonieux parmi les noms de départemens, mais c’est l’un des rares qui se prêtent à la formation d’un adjectif. C’est ainsi qu’il fut tout de suite adopté des deux parts pour désigner les insurgés qui se soulevèrent contre la Convention dans le département de la Vendée et les départemens limitrophes, et qu’il a pu, dès l’origine, consacrer l’imité de la province en voie de formation.

Le département de la Vendée, il faut bien le dire, n’avait pas d’autre mérite. Il n’a jamais pu former une unité vivante. Il se compose de quatre régions distinctes : le bocage, la plaine, le marais méridional et le marais occidental[2]. Dans les études que M. Baudrillart a consacrées aux populations agricoles de l’ouest de la France, on sent l’embarras qu’éprouve l’auteur, lorsqu’il arrive au département de la Vendée, pour en donner la physionomie générale. Il multiplie les distinctions et les réserves, et il n’aboutit par la force des choses, qu’à des conclusions incohérentes.

Le département a fait cependant, depuis le commencement du siècle, de grands progrès vers une sorte d’unité. Lors de sa création, il avait pour chef-lieu une petite ville, Fontenay-le-Comte, située à l’une de ses extrémités, et dont l’action était encore rendue plus difficile par l’absence de bonnes routes. Son chef-lieu actuel, qui ne date que de quatre-vingts ans, et qui a déjà reçu trois noms : Napoléon-Vendée, Bourbon-Vendée, La Roche-sur-Yon, est aussi une petite ville ; c’est, de plus, une ville sans passé ; mais elle est située au centre du département et elle en enserre, en quelque sorte, toutes les communes dans un admirable réseau de routes nationales, de routes départementales et de chemins de grande communication, auquel est venu s’ajouter un réseau non moins bien entendu de chemins de fer.

  1. L’abbé Simonneau, Recherches sur le mot Vendée. (Annuaire de la Société d’émulation de la Vendée, 1886.)
  2. On ne sépare pas ordinairement les deux marais ; mais, à part l’analogie de la constitution du sol, ce sont deux régions entièrement différentes par le caractère, les mœurs, l’esprit général de leurs populations. Le marais méridional a été non-seulement étranger, mais hostile à l’insurrection vendéenne, et n’a rien, au point de vue religieux comme au point de vue politique, de ce qu’on appelle l’esprit vendéen.