Comment serait-elle le principe de la forme pour l’aveugle-né ? C’est donc arbitrairement que l’on rapproche la lumière de la forme ; ou la lumière devient, tout autre chose que ce que nous appelons de ce nom. Enfin, Lamennais, par une autre simplification étrange, assimile la lumière et le son : « Entendre, c’est voir. » Lamennais s’appuie, pour le prouver, sur l’analogie des lois qui régissent le son et la lumière. Mais la même analogie, pour ne pas dire la même identité, se rencontre entre les lois de la lumière et celles de la chaleur ; et cependant Lamennais considère ces deux agens connue irréductibles l’un à l’autre ; pourquoi donc trouve-t-il plus facile d’assimiler la lumière et le son ? — Enfin, c’est encore arbitrairement que Lamennais identifie la chaleur et l’attraction, l’une qui rapproche, l’autre qui sépare, l’une qui tend à la condensation, l’autre à la raréfaction. Mais Lamennais nie que la chaleur soit une force répulsive ; il n’y en a pas de ce genre ; elle est une forme expansive ; or l’expansion et la dilatation sont la manifestation et le développement de la force ; mais alors la chaleur serait un principe de force et non d’union. Lamennais le rapproche de la vie, et c’est par là qu’il essaie de justifier son hypothèse. Au fond, ce sont des idées littéraires qui l’ont conduit à rapprocher la chaleur de l’amour, et par là d’en faire le principe d’union. Quoi qu’il en soit, l’expansion n’est pas moins contraire à l’attraction que la répulsion : et ce n’est pas expliquer cette opposition que dire que l’attraction et la chaleur sont les mêmes forces, considérées l’une dans la limite, l’autre substantiellement ; et enfin que l’attraction est soumise à des lois numériques, car la chaleur l’est également. Ce sont là des conceptions aussi vagues qu’arbitraires, très peu d’accord avec les données de la science.
Une dernière question, qui se rattache plus à la métaphysique et à la théologie qu’à la cosmologie, c’est la question du mal. Lamennais croit nécessaire de la traiter avant d’entrer dans la science de l’homme. On ne peut s’expliquer la nature humaine, si l’on ne comprend pas d’abord la nature du mal ; car il n’y a de véritable mal que dans les êtres intelligens et libres, et nous ne connaissons d’êtres intelligens et libres que l’homme. Ici, Lamennais essaie de lutter avec Pascal dans la peinture du mystère de la nature humaine et de ses contradictions radicales. Il est loin sans doute d’égaler son modèle, mais il se montre encore vraiment éloquent : « L’homme n’est pas ce qu’il devrait être. Triste assemblage de tous les contrastes, il offre sans doute d’importantes traces de grandeur, mais d’une grandeur obscurcie, caduque, inachevée. Roi de la terre, il en change la surface ; il dompte ses forces aveugles par la force supérieure qui réside en lui, et sa débile existence est