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encore la grandeur de ces lois scolaires, qui ne sont pas seulement une atteinte aux croyances d’une partie de la population française, qui seront une charge accablante pour le budget, il n’y a que quelques jours, M. Floquet faisait afficher dans toutes les communes un discours qui n’était qu’une divagation anti-cléricale, une diatribe de club indigne d’un président du conseil. Au moment où la dernière élection est venue, qu’ont fait les républicains? ils ont choisi un candidat qui, à part son obscurité, — l’obscurité n’est point un crime, — ne représentait manifestement que la mairie centrale, l’autonomie communale, l’impôt sur le revenu, toutes les fantaisies du conseil municipal, — enfin, un candidat auquel des conservateurs ne pouvaient se rallier. Le résultat le voilà : c’est ce mouvement croissant de dégoût public qui fait la fortune de M. le général Boulanger. Et le plus sérieux grief des conservateurs, des libéraux, c’est justement que les républicains, par leur obstination, par leur aveuglement, aient préparé cette situation où se rouvrent les perspectives d’une dictature mêlée d’anarchie. Aujourd’hui, le mal est fait : le scrutin du 27 janvier en a dévoilé toute la gravité!

Et maintenant comment sortir de là? Les médecins sont réunis au Palais-Bourbon comme au Luxembourg, et il faut avouer qu’il y a parmi eux plus de pessimistes que d’optimistes, qu’ils commencent par ne pas trop s’entendre sur ce qu’il y aurait à faire pour remédier à une crise si étrangement compliquée. Les conseils ne manquent pas, et le malheur est que la plupart des propositions qui se pressent ou se croisent ressemblent à une représaille contre le scrutin de Paris, contre le suffrage universel lui-même. Les uns, dans leur effarement, ne vont à rien moins qu’à réclamer des mesures violentes, des répressions, la guerre aux conspirateurs, des lois d’exception, — Comme si la violence n’était pas le meilleur moyen d’irriter les mécontentemens et d’enflammer les instincts d’opposition. Les autres se bornent modestement à proposer de revenir sans plus de retard au scrutin d’arrondissement pour fractionner et atténuer autant que possible le mouvement plébiscitaire qu’ils redoutent. Ceux-ci sont pour la dissolution de la chambre et des élections prochaines; ceux-là, en tacticiens temporisateurs, préfèrent ajourner les élections à l’automne, comptant sur l’influence pacificatrice de l’exposition et du temps. Il en est enfin, et ce sont les plus nombreux, qui avant tout croient que le ministère vaincu, battu, humilié dans l’élection dernière, ne peut plus rester au pouvoir et doit disparaître devant un ministère moins compromis. Depuis quatre jours, les consultations, les conversations se succèdent sans qu’on en soit plus avancé. La question va peut-être s’éclaircir aujourd’hui. M. Floquet paraît vouloir saisir l’occasion d’une interpellation pour exposer ses idées, réclamer un vote de confiance et proposer le scrutin d’arrondissement. Il en