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collège électoral présidentiel se trouvent ainsi réparties : 239 pour les candidats républicains, 162 pour les candidats démocrates[1].

De même que les Grecs comptaient par olympiades, les Américains pourraient diviser leurs annales par termes présidentiels, tellement l’opération du renouvellement quatriennal de la première magistrature de leur république, depuis l’adoption de la constitution, s’accomplit avec la ponctualité et la régularité d’un mouvement d’horlogerie. En ce moment s’achève le vingt-cinquième terme présidentiel, et comme dans ce pays, où le congrès ne peut pas plus forcer le président à se retirer que le président ne peut dissoudre la législature, le renouvellement de la représentation nationale, intégral pour la chambre des représentans, partiel pour le sénat, s’effectue tous les deux ans, la fin du vingt-cinquième terme présidentiel marquera également la fin du cinquantième congrès. Les États-Unis ont nommé leur cinquante et unième congrès le jour même où ils ont choisi le successeur de M. Cleveland. Un certain nombre de présidens, on le sait, ont eu l’honneur d’une réélection pour un deuxième terme ; d’autre part, quatre fois pendant le premier siècle d’existence de la république, la présidence, au cours d’un terme quatriennal, a été dévolue au vice-président, par suite de la mort du magistrat en exercice. De là vient que le nombre des présidens ne correspond pas exactement à celui des termes, et que M. Harrison, élu le 6 novembre dernier, sera seulement le vingt-deuxième de la série.

Certes, une histoire qui se présente avec ces dehors d’une précision quasi mathématique, et dont les péripéties se déroulent en compartimens d’une si rigoureuse égalité, manque à la fois de pittoresque et de variété. L’élément dramatique n’y fait pas toujours défaut ; le sombre et grandiose épisode de la guerre civile en est une preuve suffisante ; mais depuis la fin de la guerre, par exemple dans les vingt-trois années qui ont passé sur

  1. On pourrait supposer, d’après l’écart relativement considérable existant entre les deux chiffres, que le parti républicain, dans le vote populaire, a donné une grande majorité au général Harrison. Il n’en est rien, et les relevés définitifs accusent en outre ce curieux résultat que, si le président était élu directement au suffrage universel, c’est M. Cleveland qui l’eût emporté. Il a obtenu 5,526,503 suffrages, soit 98,204 de plus que son concurrent M. Harrison, qui en a réuni 5,428,290. M. Tilden avait également qui en 1876, dans le vote populaire, une majorité sur M. R. Hayes, qui fut cependant proclamé président, ayant eu une voix de plus que son rival dans le compte des votes du collège électoral présidentiel. Le caractère français s’accommoderait mal d’un système d’élection présentant de si extraordinaires singularités. — Il y a quatre ans, 9,759,351 électeurs sur 12,571,437 citoyens en âge de voter avaient pris part au scrutin et partagé leurs voix entre MM. Cleveland et Blaine. Le nombre des votans pour MM. Cleveland et Harrison, en 1888, a été de 10,954,802, soit une augmentation de 1,200,000 d’une élection à l’autre.