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C’est en voyant ces grossiers instrumens que Méhémet-Ali imagina de creuser, de chaque côté du fleuve, des canaux d’irrigation à pentes inclinées pour distribuer l’eau dans la Basse-Égypte. C’est.

    de 1m, 20 de hauteur environ, écartés l’un de l’autre de 1 mètre, supportant à leur partie supérieure une traverse en bois à laquelle est suspendu un grand levier de 3 mètres de longueur ; des cordes en palmier et un petit axe en bois forment l’assemblage de suspension du levier sur sa traverse ; les deux supports verticaux sont généralement formés, soit de branches fourchues, soit de faisceaux de roseaux fichés verticalement dans le sol et consolidés au moyen d’un empâtement de limon desséché. A l’une des extrémités du levier pend un panier analogue à celui du nattal, attaché par l’intermédiaire, d’une tige mobile de 2m, 50 environ de longueur et de cordes en palmier. A l’autre extrémité est un contrepoids en terre séchée. Le fellah pèse de son poids sur la tige de suspension du panier jusqu’à ce que celui-ci atteigne l’eau et en soit rempli ; le contrepoids en terre séchée agit alors pour faire remonter le seau jusqu’au niveau de la rigole. Sur les bords du Nil, dans la Haute-Égypte, le voyageur rencontre souvent des chadoufs fonctionnant sur des rangées de trois ou quatre de front ; il ont saisi de l’aspect pittoresque de tous ces leviers montant et descendant lentement en cadence, sous l’impulsion régulière que leur impriment des nègres ou des fellahs bronzés du soleil, presque nus, ruisselans d’eau et maintenus en haleine par ce chant nasillard que fait entendre l’un des travailleurs et qui se mêle au clapotement de l’eau qui tombe. De nombreuses observations faites sur ce sujet par les ingénieurs de l’expédition française d’Égypte, il résulte que le travail produit par le fellah avec le chadouf est de 330 kilogrammètres en moyenne par minute, tandis que l’action dynamique d’un homme de force moyenne, élevant des poids avec une corde et une poulie et faisant ensuite descendre la corde à vide, n’est que de 210 kilogrammètres. — La sakié. — Pour des hauteurs supérieures à 3 mètres, le chadouf est une machine onéreuse ; aussi emploie-t-on plus fréquemment, dans ce cas, une sorte de noria qui est appelée sakié. La sakié est très répandue en Égypte ; elle est disposée de la façon suivante : une roue en bois de 1m,50 environ de diamètre et garnie d’alluchons de 0m, 20 de longueur ; l’arbre de cette roue est vertical ; il porte à la partie inférieure, au-dessous du niveau du sol, sur une crapaudine grossière, formée de pièces de bois juxtaposées, et il est relié par des cordes d’une façon invariable à un levier horizontal de 3 mètres de longueur, qui, mis en mouvement par un bœuf ou un autre animal, entraîne dans sa rotation la roue horizontale. En résumé, la sakié se compose d’un manège mettant en mouvement un engrenage à lanterne qui entraîne une roue verticale portant une chaîne de noria. Tout l’appareil est grossièrement fait avec des bois d’acacia tout tordus, qu’on trouve dans le pays et qui sont employés à peine équarris. Aussi la présence d’une sakié s’annonce de loin par un grincement continu, dont la plainte incessante, s’élevant dans le calme de la nuit, marque l’effort au prix duquel l’homme apporte la fertilité à la terre desséchée. — Le tabouth. — Dans le nord de la Basse-Égypte, toutes les fois qu’on a à élever l’eau à moins de 3 mètres de hauteur, on se sert d’une roue sur le pourtour de laquelle sont ménagés des encoffremens dans lesquels l’eau est élevée et d’où elle se déverse dans une auge latérale, et de là dans la rigole d’irrigation. L’animal moteur et généralement un buffle. — Roue hydraulique à palettes. — Elle est mue par une chute d’eau qui actionne des roues à palettes, lesquelles, portant sur leur pourtour des pots en terre, recueillent l’eau et l’élèvent jusqu’au niveau des terres. Ordinairement ces roues sont munies de douze palettes de 0m, 90 de longueur sur 0m, 60 de largeur et portent une couronne de vingt-quatre vases en terre de 7 litres de capacité. (Extrait de l’Irrigation en Égypte, par M. J. Barois, ingénieur en chef des ponts et chaussées. Paris, 1887 ; Imprimerie nationale.)