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par voie de marchés passés avec des fournisseurs ; 2° achats directs par les régimens[1] ; 3° achats par les dépôts de remonte.

Le premier système, désastreux pour l’élevage national, met les corps à la merci de spéculateurs.

Le deuxième n’est pas moins onéreux, parce que les corps se font mutuellement concurrence et finissent toujours par traiter avec des marchands de chevaux, afin d’éviter l’incertitude de recherches longues et souvent infructueuses.

Le troisième, essayé en 1826, abandonné en 1831, repris en 1837, s’est conservé jusqu’à nous.

Remarquons tout d’abord que l’expression « dépôt de remonte, » employée en France et en Allemagne, désigne des institutions absolument différentes. De l’autre côté du Rhin, le dépôt de remonte est un établissement civil, puisque aucun militaire en activité n’en fait partie, où l’on fait de l’agriculture et de l’élevage : on y reçoit des chevaux de trois ans qui, s’ils tournent bien, sont livres aux corps à cinq ans.

En France, le dépôt de remonte est une simple caserne de passage, placée, en général, dans les pays d’élevage que parcourent des commissions d’officiers. Une troupe spéciale, répartie en compagnies de cavaliers de remonte, pourvues d’officiers et de cadres, suit les commissions d’achat dans leurs pérégrinations, ramène au dépôt les animaux achetés et les y soigne pendant quelques semaines. Au fur et à mesure que ces lots de chevaux, destinés aux différentes armes, peuvent être répartis en détachemens d’un nombre suffisant d’animaux de même espèce, les corps destinataires sont invités à les y faire prendre.

Depuis l’origine jusqu’à ces dernières années, la question des remontes avait été mal posée en France. L’armée n’acceptait que des chevaux faits, c’est-à-dire aptes à être mis en service. Elle n’en trouvait pas, parce qu’il n’y en avait pas. On conçoit qu’il importe à tout propriétaire ou fermier se livrant à l’élevage d’écouler ses produits le plus rapidement possible : c’est une obligation absolue de son industrie que de diminuer les frais de nourriture,

  1. Pour permettre le fonctionnement de ce système, les conseils d’administration avaient une masse de remonte à raison, par cheval et par an, de 71 fr. 43 pour la grosse cavalerie, de 65 fr. 72 pour les dragons ut l’artillerie à cheval, et de 51 fr. 43 pour la cavalerie légère et les trains. Cette masse s’augmentait du produit de la vente des chevaux réformés. Les prix moyens des chevaux de remonte ont été :
    1825 1835 1845 1855-1865 1875 1885
    Cuirassiers 500 650 750 800 1.000 1.300
    Dragons 460 520 600 650 900 1.050
    Cavalerie légère 360 430 500 550 800 930