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REVUE DRAMATIQUE

Théâtre de l’Odéon : Germinie Lacerteux, pièce en dix tableaux, de M. Edmond de Goncourt.

S’il ne s’agissait que de constater la chute récente, retentissante, et méritée, sur la scène de l’Odéon, de la Germinie Lacerteux de M. de Goncourt, quatre mots en feraient l’affaire, et ces quatre mots, pour beaucoup de raisons, je ne sais, en y songeant, si je les eusse écrits. L’idée au moins ne m’est pas venue de parler du drame de M. Auguste Vacquerie, Jalousie, tombé sans fracas au Gymnase, dix ou douze jours auparavant. Mais, tirée, comme elle l’est, de l’un des meilleurs romans des deux frères, et en tout cas du plus connu, traitée par des moyens qui se disent ou qui se croient nouveaux, portée enfin par une cabale dont l’intolérance n’a d’égale que l’habileté, Germinie Lacerteux n’est pas une pièce ordinaire, ni surtout indifférente ; et, quoique n’ayant pas les apparences d’un manifeste, puisque l’auteur et ses amis ont voulu qu’elle en eût l’importance, nous ne saurions nous dérober à la discussion du système d’art dont on prétend qu’elle serait l’expression. Ce sera tant pis pour M. de Goncourt, si nous trouvons, comme je le crains, qu’au fond de ce système il y a peut-être moins de nouveauté que d’impuissance, plus de naïveté que de hardiesse, et beaucoup moins enfin d’originalité que d’ignorance ou de méconnaissance des lois, des conditions, et de la nature du théâtre.

Réalistes ou naturalistes, ils se trompent en effet, et, sans le vouloir assurément, ils donnent le change à l’opinion, quand ils disent, ou qu’ils font dire, par des gens apostés, que ce que nous leur disputons, c’est le choix de leurs sujets. Non, la vérité ne nous fait pas peur ; et nous