Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 91.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si, comme l’indiquent les observations de M. Tissandier, le sable des déserts contient des particules végétales clairsemées, on n’a encore jamais constaté dans les sables du Sahara ni dans ceux du Gobi la moindre trace animale, ce qui prouverait qu’ils ne peuvent avoir été déposés par l’eau de mer, car ils contiendraient alors quelques restes animaux, du moins de classe inférieure, comme c’est si souvent le cas avec les sables marins des côtes.

Après ce que nous avons rapporté sur les sables des déserts, il nous paraît impossible de ne pas admettre leur origine subaérienne, tout en prenant en sérieuse considération l’opinion des savans qui, comme M. Zittel, soutiennent la nécessité d’une coopération de la force érosive de l’eau pour expliquer les exemples remarquables d’ablations et d’excavations qu’offre le désert, tels que l’enlèvement des masses de rochers dont les témoins représentent les restes, les profonds sillonnemens d’anciens lits desséchés (oicudi), le creusement de parois abruptes qui forment les bords de plusieurs oasis, etc. Au reste, en invoquant l’intervention des pluies torrentielles, nous ne faisons qu’ajouter un fait de plus à tous ceux que présente l’histoire climatologique de la majorité des contrées de l’Orient, ainsi que nous le verrons plus tard.


III

Les énormes masses sablonneuses du Sahara renferment de nombreux réservoirs d’eau souterraine. C’est une des particularités les plus importantes de ces contrées, non-seulement sous le rapport scientifique, mais encore sous celui de leur avenir, en fournissant à l’homme les moyens d’utiliser ces réservoirs pour rendre habitables des régions aujourd’hui désertes, à la seule exception toutefois des oasis, richement pourvues d’eaux souterraines. Ainsi, dans les oasis de Khargeh et de Dakhel, les puits atteignent, à une profondeur de 64 à 105 mètres, les grès, d’où l’eau s’élance en jets puissans. Dans les deux oasis méridionales, la température des sources est généralement de 35 à 38 degrés ; à Farafrah, où l’eau doit traverser les couches de terrain crétacé, la température s’abaisse à 26 degrés, mais elle est de 28 dans l’oasis de Syouah, où l’eau, jaillissant à travers le sol tertiaire salé, perd beaucoup de sa bonne qualité. Enfin, la température de l’eau oscille entre 24 et 36 degrés dans les puits de l’oasis de Beharieh, lesquels remontent à une antiquité reculée, car les restes nombreux de puits artésiens construits par les Romains sur plusieurs points de la Libye prouvent que les puits artésiens, dont les modernes réclament l’invention, étaient parfaitement connus des anciens. Les monumens de