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Si, au lieu de s’arrêter à 100 degrés, on chauffe l’extrait jusqu’au rouge sombre, on chasse la glycérine, qui se volatilise ; les tartrates se transforment en carbonates correspondans ; les matières organiques se détruisent avec production d’eau qui s’évapore et de carbone qui brûle et se dissipe en fumée. Les cendres ne se composent donc plus que de sels minéraux préexistant dans la liqueur, comme les phosphates et sulfates, ou résultant de la calcination, ainsi que les carbonates. Le rapport du poids des cendres à celui de l’extrait abandonné, soit au bain-marie, soit dans le vide, est loin d’être invariable ; il n’atteint pas un dixième si on opère sur les bons crus de Bourgogne, dépasse à peine cette limite lorsque l’on calcine le résidu sec des bordeaux supérieurs, et ne devient plus fort que dans le cas des vins du Gard, de l’Hérault, de l’Aude. Le moment n’est pas encore venu d’examiner l’effet du plâtrage sur le poids des cendres ; mais il est clair que cette manipulation tend à augmenter ce poids et dans une forte proportion. Lorsque le chimiste veut analyser les cendres d’une manière complète, il commence toujours par les laver à l’eau chaude et par filtrer ; le filtre sépare les sels solubles à base d’alcali des sels insolubles, comme les phosphates à base de chaux, fer, alumine ou magnésie. Ce sont procédés de laboratoire que nous n’avons pas à approfondir ; mais un profane qui serait témoin des opérations s’apercevrait qu’un vin blanc, au rebours d’un vin rouge, laisse peu de résidu sur le filtre et n’abandonne que des traces de phosphate de chaux. Aussi, au point de vue nutritif et hygiénique, les vins colorés sont-ils bien supérieurs aux autres ; si les derniers ne constituent qu’une boisson rafraîchissante, les premiers fonctionnent comme de véritables alimens propres à fournir à notre organisme une fraction de l’acide phosphorique qui lui est indispensable.

Nous connaissons déjà la marche qu’il faut suivre pour déterminer l’acidité d’un vin ; il nous reste à présent à indiquer et à caractériser l’ensemble des résultats obtenus. Assez faible dans les vins de Bordeaux, un peu plus forte dans les vins de Bourgogne, plus accentuée encore si l’on analyse les vins du Midi, l’acidité devient maxima lorsqu’on s’attaque aux vins blancs de l’ouest de la France, à certains crus d’Espagne, du midi de l’Italie ou d’Algérie (exemple : le vin de Zaoura). A priori, il semblerait qu’un vin devrait être d’autant plus acide qu’il a été récolté dans une région plus froide et surtout plus tiède. Cependant, sous un ciel peu favorable à la maturité du raisin, l’acidité (nous ne disons pas « l’aigreur ») n’est pas forcément très accentuée. Par exemple, le vin plus que médiocre qu’on récolte à grand’peine sur les coteaux d’Argenteuil se trouve être moins acide pour le chimiste qu’un liquide provenant des plaines brûlées de Lunel ou de Montpellier.