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produit plus riche que 15 degrés, et cette mesure est d’autant plus juste que le madère et le marsala ont besoin d’être largement vinés ou alcoolisés pour arriver à peser 20 ou 21 degrés, nombre énorme qu’un liquide ne saurait atteindre sans perdre le nom de vin, réservé au « produit résultant de la fermentation du jus de raisins frais. » Sous les climats les plus favorables, avec les meilleures espèces, l’homme ne peut arriver à produire une proportion d’alcool absolu plus forte que 16 ou 17 degrés.

Le nombre traduisant le poids de l’extrait à 100 degrés, comme celui exprimant le degré alcoolique, se range presque toujours, dans la grande majorité des cas, aux environs d’une moyenne peu sujette à varier, ce qui ne l’empêche pas de tomber quelquefois bien au-dessous de cette limite. Vingt, vingt-deux, vingt-cinq grammes par litre de vin, tels sont les chiffres habituels ; mais les sauterne, les bordeaux blancs, les chablis, n’abandonnent pas plus de 16 à 20 grammes. Le minimum (13 à 15 grammes) correspond à des vins récoltés dans l’Yonne et provenant de Coulanges et de Chablis, supérieurs eux-mêmes aux vins blancs de la Basse-Bourgogne. L’infériorité générale des vins blancs est due à l’absence d’une partie de la matière colorante propre aux seuls vins rouges, ainsi qu’au défaut de tannin ; mais comme les vins colorés renferment en général moins de sucre, la différence est parfois atténuée par la présence d’un petit excès de glucose dans les vins blancs. Que la proportion de sucre vienne à augmenter, et l’extrait atteint et dépasse la moyenne des vins rouges eux-mêmes ; on recueille 30 grammes d’extrait lorsqu’on évapore un litre de vin blanc de Vouvray. Après disparition de l’eau et de l’alcool, les vins du Rhin, presque toujours sucrés, abandonnent beaucoup de matières solides ; force-t-on artificiellement la dose de sucre, le dépôt s’accroît d’autant ; exemple : les vins mousseux de Champagne et du Rhin contiennent 100 à 1 30 grammes de matières fixes. Avec les vins de liqueur du sud de l’Italie, de la Sicile ou de l’Espagne, il n’y a pour ainsi dire plus de limite : on observe 60, 100, 200 grammes comme chiffres habituels. A l’exposition vinicole de 1877, les commissaires espagnols ont analysé un vin de Malaga, que nous citons à titre de curieux exemple, et qui finissait, après dessiccation à 100 degrés, par ne perdre que la moitié environ de son poids ; il est vrai que ce sirop, — on ne peut guère lui donner d’autre nom, — défalcation faite du sucre dont on l’avait saturé, n’était pas plus riche en élémens solides que la moyenne des vins de consommation courante récoltés au-delà des Pyrénées. L’extrait, cela va sans dire, est aussi quelque peu renforcé si le vin a été plâtré à la cuve, et l’accroissement qu’on peut observer est en raison directe du plâtrage.