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plus cher, il est vrai, mais l’opération est infiniment plus courte et ne dure que peu de minutes. De plus, pour manier l’ébullioscope, il n’est pas besoin d’être chimiste ; il suffit d’être attentif. Aussi l’usage de cet instrument tend-il à se répandre de plus en plus, en dehors des laboratoires d’analyse ; des critiques minutieux pourront dire, et avec raison, qu’il se trompe souvent de quelques dixièmes de degrés. Mais l’erreur n’est jamais très forte ; et, du reste, comme nous l’avons dit à propos de l’extrait sec, peu importe un écart lorsqu’il est toujours le même. Un négociant en gros de Nîmes achète du vin à un propriétaire de Béziers ; celui-ci vend son vin comme garanti pesant 7 degrés après essai au Malligand ; le véritable titre n’est que 6 degrés 1/2 ; mais à Nîmes, le négociant retrouvera le nombre 7 à l’aide de son propre appareil, et tous deux seront d’accord. Au reste, en général, les indications se trouvent trop faibles et non pas trop fortes, comme dans l’exemple choisi.

Il n’est pas inutile de faire observer qu’avant de commencer toute détermination, il faut procéder à un essai « à blanc » en faisant bouillir de l’eau pure, car la température d’ébullition d’un liquide n’est pas indépendante de la pression atmosphérique. On appréciera ainsi la correction dont il faudra dans la suite augmenter ou diminuer les résultats, et, de temps en temps, cette épreuve préliminaire doit être renouvelée. Quelquefois, suivant les indications de M. Amagat, l’appareil est double et permet d’essayer à la fois l’eau et le vin simultanément chauffés[1].

Le laboratoire municipal de Paris, se fondant sur des raisons qui seront discutées dans la seconde partie de ce travail, admet qu’un vin marchand destiné à être vendu au détail doit titrer au moins 10 degrés. Admettons provisoirement ce chiffre arbitraire ; il va nous servir à former deux catégories de boissons que nous subdiviserons au moyen de deux nouveaux nombres 7 et 12.

Donc fournissons d’abord quelques exemples de vins naturels, pesant moins de 10 degrés, ce qui, par parenthèse, ne les empêche point d’être souvent très sains et très agréables à boire.

Les valeurs les plus faibles, 5 à 7 degrés (telle est aussi la moyenne des piquettes du Midi, des bons cidres, des bières d’Ecosse, de Bruxelles, de Strasbourg), ont été constatées avec certains échantillons de vins rouges ayant l’origine suivante : Bugey, Saint-Pierre d’Albigny (Savoie), Joigny (1882), Mirecourt (Vosges), Berry, vallée du Neckar (Allemagne), Gâtinais, Argenteuil, et

  1. A mesure que l’ébullition progresse, l’alcool, plus volatil que l’eau, s’élimine petit à petit, et le litre alcoolique s’affaiblit d’autant. Cet inconvénient est suffisamment atténué grâce à un dispositif fort simple : les vapeurs qui se dégagent du vin sont condensées presque immédiatement et retombent dans le liquide générateur.