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petites erreurs, s’il y en a, s’éliminent d’elles-mêmes, du moment que les deux échantillons ont subi des épreuves identiques, et, au contraire, les grosses différences intrinsèques dérivant de la constitution artificielle du vin manipulé, les grosses différences sautent aux yeux.

Une fois la détermination effectuée d’une façon ou d’une autre sur un petit volume, on énonce toujours les résultats en les rapportant à un litre de vin ; du reste, il ne s’agit que de multiplier le résultat de la pesée par un facteur simple, 100 par exemple, si l’on a évaporé 10 centimètres cubes de liquide.

Est-il possible à un viticulteur ou à un négociant d’estimer approximativement par lui-même la dose de matières fixes incorporées dans un vin, sans recourir au long et minutieux procédé de l’évaporation, et sans avoir à sa disposition tout un matériel encombrant et coûteux ? Une méthode expéditive, connue depuis quelques années déjà, et fondée sur un principe fort simple, répond à merveille au but proposé. Nous pouvons considérer le vin comme un mélange à proportions variables de trois élémens distincts : l’eau, l’alcool, l’extrait. Le vin aurait la densité de l’eau pure, c’est-à-dire le poids spécifique l à la température de 15 degrés centigrades[1], si la présence de l’alcool, dont la densité vaut 0,795 seulement, n’intervenait pour l’alléger, et si les matières fixes, toutes plus pesantes que l’eau, ne tendaient au contraire à l’alourdir et à en relever la densité. Ceci posé, mesurons, au moyen d’un des instrumens dont il sera question bientôt, le titre alcoolique du vin, puis observons la densité du liquide au moyen de « l’œnobaromètre[2] » de M. Houdart, sorte de gros aréomètre très sensible et à tige très fine ; nous obtiendrons deux chiffres propres à nous servir de repères pour retrouver, avec l’aide d’une table à double entrée dressée empiriquement, le coefficient extractif demandé. Comme, pour établir ses listes, M. Houdart s’est basé sur la composition normale moyenne des vins purs, son instrument fournit des données, soit un peu fortes, soit trop faibles, mais toujours très rapprochées de la vérité, et amplement suffisantes aux besoins du commerce[3]. En revanche, il est facile de concevoir

  1. Il est d’usage, lorsque l’on essaie un vin ou un alcool, d’effectuer toutes les mesures de volume ou de poids spécifique à 15 degrés, température plus commode à obtenir que celles de 0 degré ou de 4 degrés. Si le laboratoire est moins chaud ou moins froid, les corrections, soit à retrancher, soit à ajouter, sont minimes et peuvent être appréciées exactement.
  2. Ce terme a été forgé avec les trois mots grecs : οἰνος (oinos) vin ; βασος (basos), pesanteur ; μέτρον (metron), mesure.
  3. Le procédé Houdart fournit l’extrait à 100 degrés ; le poids de l’extrait dans le vide s’en déduit en multipliant le chiffre obtenu par l’inverse de 0.785, soit par 1.27. Pratiquement, il suffit d’ajouter un cinquième au poids de l’extrait œnobarométrique.