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alors on risque non-seulement d’altérer ou même de détruire quelques-uns des principes colorans, mais encore de volatiliser une bonne partie de la glycérine. Cette transformation chimique ou cette déperdition, corrélatives d’un dégagement de vapeur qui pourrait faire croire à une dessiccation incomplète, se traduisent en pratique par une perte de poids, et le résultat final est beaucoup trop faible.

Quand bien même le chimiste aurait procédé avec toute la prudence imaginable, l’altération du résidu est impossible à éviter ; aussi l’extrait, diffusé dans une quantité convenable d’eau alcoolisée, et, au besoin, aiguisée d’un peu d’acide acétique, l’extrait ne reproduira jamais le vin primitif. Il ne faut pas oublier que la pesée du résidu doit se faire avant que l’excès de chaleur ne se soit dissipé, car l’extrait absorbe assez rapidement l’humidité du laboratoire ; cette propriété hygroscopique dérive de la porosité de l’extrait, et d’ailleurs s’explique sans peine par l’influence de la glycérine, liquide éminemment avide d’eau.

La difficulté ne laisse pas que d’être embarrassante. Certains savans se sont efforcés, non pas d’éliminer l’erreur, ce qui est impossible, mais de rendre son influence à peu près invariable ; ils évaporent, toujours au moyen du bain-marie, 10 centimètres cubes de vin, dans une capsule à fond plat, et arrêtent la dessiccation au bout d’un laps de temps toujours égal à quatre heures et demie ; d’autres praticiens ôtent la capsule du bain-marie avant la fin de l’opération, mais pour l’enfermer durant cinq heures dans l’étuve à eau bouillante. MM. Gautier et Magnier de La Source proscrivent absolument l’emploi de la chaleur, et conseillent une autre méthode beaucoup plus lente, mais d’après eux beaucoup plus sûre, qui est plus exclusivement employée au laboratoire municipal de la ville de Paris. On introduit une très petite quantité de vin, 5 centimètres cubes seulement, dans une capsule à fond plat[1] qu’on dispose à côté de son couvercle sous une cloche où l’on fait le vide. Les vapeurs qui se dégagent de l’échantillon du vin sont absorbées par de l’acide sulfurique concentré ou par de l’acide phosphorique, en un mot, par des corps susceptibles d’entretenir à l’intérieur de la cloche une sécheresse permanente. Il faut attendre huit jours, puis, ce délai expiré, on laisse rentrer l’air dans le récipient ; on soulève celui-ci, on recouvre promptement la capsule de son couvercle et l’on pèse sans perdre de temps.

  1. Il est facile de concevoir qu’avec un vase dont le fond est creux, les résidus tendent à s’accumuler au centre du vase. L’évaporation des couches inférieures est entravée par la présence de couches supérieures trop épaisses. Les moindres détails ont souvent une importance considérable en chimie analytique.