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Il succomba à la tâche, ruiné lui aussi, mais ayant réussi à poser dans Londres 50 lieues de tuyaux conducteurs, et à donner un commencement d’exécution à la conception hardie de Joseph Lebon. Sous Louis XVIII seulement, l’idée de l’inventeur français, d’abord appliquée à Londres, fut adoptée à Paris, d’où elle devait se répandre dans le monde entier.

Ce nouveau système d’éclairage exigeait de grandes quantités de houille ; de toutes parts, dans le royaume-uni, on multipliait les usines à gaz et aussi les ateliers de fonte. Subitement la métallurgie devenait l’une des principales branches d’industrie de l’Angleterre ; le règne du fer commençait, les hauts-fourneaux envahissaient les comtés du Nord et l’Ecosse. Il fallait des rails pour les chemins de fer, des conduites pour l’eau et le gaz, du fer pour les locomotives, pour les usines qui s’édifiaient, pour les machines que l’on construisait; puis bientôt l’artillerie, les navires en fer, la marine cuirassée, allaient demander à la métallurgie une production incessante, une fonte plus résistante, une consommation prodigieuse de houille. A l’œuvre sur tous les points, on s’acharnait à la recherche du combustible indispensable, on ouvrait de nouvelles mines, on rouvrait les anciennes, et le prix du charbon montait.

James Baird était prêt, et son heure était venue. Il eût pu, dès ce moment, réaliser une fortune en rétrocédant ses nombreuses houillères; il n’y songea pas un instant. Le courant attendu l’emportait, il le suivit jusqu’au bout, employant ses premiers bénéfices à ouvrir de nouveaux puits d’extraction, les autres à s’assurer de nouvelles mines, élargissant constamment le champ de son exploitation. Puis les gisemens de fer attirèrent son attention. Grand propriétaire de houillères, il voulut l’être aussi de minerais, posséder les deux matières premières de la métallurgie, profiter du bas prix auquel elles lui revenaient l’une et l’autre pour s’assurer le bénéfice de la fabrication. Mais il sut attendre que ces procédés de fabrication fussent bien fixés. Toute industrie nouvelle débute par des tâtonnemens improductifs, des essais coûteux qui souvent ruinent les impatiens et enrichissent ceux qui, instruits par leurs erreurs, éclairés par leurs découvertes tardives, évitent les premières et mettent à profit les secondes.

De 1828 à 1830, la métallurgie prit un essor rapide. Nielson, de Glasgow, expérimentait dans les fonderies de la Clyde un procédé nouveau, qui consistait à injecter sur le minerai introduit dans les hauts-fourneaux, non plus de l’air froid, mais de l’air porté à 200 ou 300 degrés, au moyen de la flamme perdue du foyer d’alimentation. Cette substitution de l’air chaud à l’air froid assurait un fonctionnement