Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 90.djvu/771

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la hauteur de leur mission et de ne point tromper la confiance qu’inspire leur bonne volonté.


IX. — LE COMITÉ DES DAMES DE LA CROIX ROUGE.

Il est facile de faire construire des voitures d’ambulance, d’acheter des boîtes de chirurgie et de former ainsi un magasin de secours où l’on n’aura qu’à puiser en cas d’alerte ; mais il est impossible d’attacher et de fixer à la Croix rouge un personnel hospitalier qui soit toujours prêt à l’action et qui se réunisse au premier appel, comme un bataillon se rassemble au signal du tambour. Les médecins, les chirurgiens, les pharmaciens, qui, dans le courant normal de l’existence, sont en exercice permanent auprès de leur clientèle, représentent une troupe scientifique que l’on pourra sans peine grouper et distribuer selon les exigences de la guerre et les instructions du ministre. Ceux-là, on sait où les trouver. Une lettre de service suffira pour les diriger là où l’on aura besoin d’eux. Quant aux aides indispensables, quoique secondaires, il ne peut en être ainsi ; car, dans la vie de tous les jours, ils n’ont pas de fonctions analogues à celle qui leur est réservée pendant la période des hostilités ; en temps de paix, ils n’ont point de lit d’hôpital à surveiller, ils n’ont point de blessés à recueillir, à placer sur un brancard, à transporter. La Société de secours peut donner une instruction sommaire aux infirmiers et aux brancardiers ; mais lorsque les canons se taisent et que les sabres sont au fourreau, elle ne peut les utiliser et les tenir en haleine, assemblés autour d’elle ; il en résulte que le jour où elle mettra en mouvement le matériel des ambulances et des hôpitaux auxiliaires, elle devra le faire accompagner par des recrues qui seront obligées de s’initier à un service dont elles ignoreront les détails et l’importance.

C’est là l’inconvénient qui frappe toute société secourable organisée en vue d’une circonstance spéciale, lorsque cette circonstance ne se produit pas. Malgré les améliorations incessamment apportées à la construction, souvent fort dispendieuse, du matériel supérieur de l’œuvre, celle-ci restera toujours impuissante à maintenir en permanence, sous sa direction immédiate, un personnel composé de volontaires qui est dans la nécessité de pourvoir aux besoins de l’existence, et pour lequel toute perte de temps est un sacrifice que, sous peine de ruine, la caisse de la Société ne peut compenser. Au jour du péril, les infirmiers ne manqueront pas, ni les brancardiers non plus ; on n’aura que l’embarras du choix de ceux qui demanderont à se joindre aux frères de la doctrine chrétienne ; il en viendra par humanité plus que l’on n’en