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coûta pas à nos troupes moins de 6 morts et de 23 blessés, dont 3 officiers. Dès le lendemain, les mesures de sûreté furent tellement mieux prises que, malgré l’opposition des Arabes, et sans la moindre perte, mille pieds d’arbres furent jetés bas en cinq heures.

Il convenait d’être aussi très vigilant au dehors, de tenir ouvertes et libres les communications avec Biskra et Batna; or elles étaient menacées. Le courrier d’Alger venait d’être enlevé par deux cavaliers du goum qui étaient passés à l’ennemi. D’autre part, le général Herbillon était averti que Mohammed-bel-Hadj, l’ancien khalifa d’Abd-el-Kader, était sorti du Souf, où il avait fait séjour, et menaçait Sidi-Okba; d’autre part aussi, que les caravanes des Sahariens, revenant du Tell, témoignaient de leur sympathie pour l’insurrection. La plus grande part de la cavalerie ayant été envoyée, avec, le colonel de Mirbeck, sur la route de Batna, il ne restait au camp pas beaucoup plus de 250 chevaux. Le 30 octobre au soir, une reconnaissance fut attaquée subitement, entre Farfar et Tolga, par des Sahariens. Le lendemain, le général Herbillon se mit de bonne heure en campagne. Il emmenait toute la cavalerie disponible, y compris le goum, une section de montagne et trois compagnies de chasseurs à pied. A peine avait-il passé Farfar qu’il sévit en présence de 700 ou 800 cavaliers, appuyés par un nombre à, peu près égal de fantassins, sur la lisière de l’oasis. Le combat fut vit, mais court. Chargés, sabrés, fusillés, canonnés, les cavaliers tournèrent bride et les fantassins se hâtèrent de rentrer sous bois. Pendant cette rencontre, Bou-Ziane avait habilement préparé contre la gauche des travaux de siège une sortie qui ne réussit d’ailleurs qu’à, mettre le feu au fascinage d’une batterie. Ce demi-succès ne laissa pas d’encourager l’assiégé à renouveler sa tentative. Le 5 novembre, entre huit et neuf heures du soir, le ciel, très sombre, s’éclaira tout à coup. Des amas de brindilles flambaient sur tout, le front d’attaque, et des centaines d’Arabes, la torche à la main, se ruaient sur les approches. A droite, un coup de mitraille suffit pour les arrêter; mais à gauche, ils réussirent à incendier le masque et la galerie blindée que les sapeurs avaient poussée jusqu’aux deux tiers du fossé. On en voyait qui, du chemin de ronde, exposés à la fusillade, ne laissaient pas d’attiser le feu avec de grandes perches. La nuit suivante, ils revinrent à la charge et parvinrent à détruire complètement le blindage.

Tel était l’état des affaires quand, le 8 novembre au soir, le camp fit fête au colonel Canrobert, venant de Sétif à la tête d’un bataillon de zouaves, d’un bataillon du 16e de ligne, d’un escadron de spahis et d’une section d’obusiers de montagne. En route, au-dessous de Bou-Sâda, le colonel avait fait sur les Sahariens une razzia de 2,500 moutons et de 1,500 chèvres, qui vinrent fort à propos ravitailler