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mais dans une proportion, je le crains bien, qui restera inférieure à celle de la destruction. Là aussi les règlemens en usage ont été jugés insuffisans ; ils l’étaient depuis longtemps, nous l’avons démontré plus haut en parlant des campagnes de Crimée et d’Italie ; mais il a fallu le désastre de 1870-1871, il a fallu le service militaire obligatoire, pour briser la routine et donner aux élémens de salut une partie de l’ampleur qu’ils auraient dû toujours avoir. Treize ans après la signature du traité de Francfort, le 25 août 1884, on promulgue le « décret portant règlement sur le service de santé des armées en campagne. » C’est l’abrogation du règlement du 4 avril 1867, qui n’était plus en rapport avec les principes posés par la loi du 16 mars 1882 sur l’administration de l’armée. Dans ce nouveau règlement, une large part est faite à la Société de secours aux blessés ; elle n’arrive qu’en seconde ligne, mais on peut dire que c’est à ses soins qu’est confié tout blessé évacué du champ de bataille.

Un croquis « figuratif du service de santé en campagne[1] » explique et détermine le rôle réservé à la Croix rouge de France. Les chirurgiens militaires sont chargés du « service de l’avant ; » ils sont au combat, ou tout au moins sur le terrain de la lutte. Les dispositions sont ingénieuses, elles semblent avoir tout prévu et être appelées à être d’une utilité irréprochable, si le mouvement des batailles ne vient pas les déranger. Immédiatement derrière les troupes engagées, représentées sur le plan par deux divisions d’infanterie et une brigade de cavalerie, sont établis les postes de secours régimentaires ; au-dessous, à portée de communication facile, trois ambulances, dont une réservée pour la cavalerie ; plus bas et assez près, on établit la grande ambulance du quartier-général. Ces postes et ces ambulances sont en contact avec l’armée qui est au feu ; entre eux et elle, le va-et-vient doit être perpétuel si le serice des brancardiers a été bien organisé et s’il est fait par des hommes dévoués. A distance, encore près du champ de bataille, mais assez loin pour n’être pas sous la trajectoire des projectiles, ni être exposés à des « houzardailles, » je vois quatre hôpitaux de campagne qui peuvent communiquer facilement avec un hôpital « à destination spéciale » et avec un hôpital d’évacuation. C’est là que se trouve « la tête d’étapes de route ; » c’est aussi « la limite de la zone du directeur des étapes. » C’est-à-dire, si je ne me trompe, c’est là que s’arrête, théoriquement du moins, l’action du service de santé militaire ; au-dessous de cette zone, le champ appartient aux hôpitaux auxiliaires, ce qui, en langage officiel, signifie

  1. Ministère de la guerre : Règlement sur le service de santé de l’armée, deuxième partie. — Service de santé en campagne. Paris, L. Baudoin, 1884 ; p. 3.