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zouaves. Avant de descendre dans le Zab, le commandant supérieur de la province de Constantine avait dû laisser au général de Salles, son remplaçant intérimaire, des forces suffisantes pour assurer partout l’ordre et tenir les malintentionnés en crainte. Comme c’était la région du Hodna et de Bou-Sada qui était la plus suspecte, le colonel de Barral s’y était transporté avec une colonne de 2,500 hommes.

Toutes ces précautions de sûreté prises, le général Herbillon ne put d’abord réunir, pour l’expédition dont il s’était réservé le commandement, qu’une force de 4,500 hommes, ainsi composée : un bataillon du 8e de ligne, deux bataillons du 43e, le 5e bataillon de chasseurs, le 3e bataillon d’Afrique, un bataillon du 2e étranger, le bataillon de tirailleurs indigènes de la province, quatre escadrons du 3e chasseurs d’Afrique et du 3e spahis, une batterie de campagne, deux sections de montagne, trois mortiers, une section de fusils de rempart, un détachement de génie, un détachement du train des équipages. Il y avait de plus un convoi de munitions et de vivres, escorté d’un goum qui faisait nombre. Parties de Constantine, du 24 au 25 septembre, arrivées le 28 à Batna, le 4 octobre à Biskra, les troupes firent halte le 7, à huit heures du matin, en vue des palmiers qui couvraient Zaatcha.


IV.

Le campement s’établit au nord-est, sur la pente d’un mamelon découvert, au pied duquel sourdait un ruisseau dont l’eau n’était pas trop saumâtre. Pendant ce temps, la cavalerie au nord, le goum au sud, firent la reconnaissance de l’oasis. Ces préliminaires achevés, le général Herbillon donna l’ordre d’occuper la zaouïa. La colonne d’attaque, formée d’élémens empruntés aux divers corps d’infanterie légère, et conduite par le colonel Carbuccia, en eut bientôt délogé les Arabes ; mais, entraînés par le mouvement du combat, les chasseurs et les zéphyrs particulièrement s’aventurèrent dans les jardins sans guide, sans prudence, de sorte que, fusillés presque à bout portant par des tireurs invisibles, ils furent obligés de reculer sans avoir eu le temps d’emporter tous leurs morts ni tous leurs blessés. Quelques-uns de ces malheureux, — détail horrible, — furent achevés, sous les yeux de leurs camarades impuissans à les sauver, par des femmes qui étaient venues, en habits de fête, se mêler aux défenseurs de Zaatcha : 24 morts et 47 blessés furent les victimes de cette malheureuse affaire. De tout le jour la fusillade ne cessa pas ; le soir venu, on ne comptait pas moins de 13 officiers à l’ambulance; parmi eux, le capitaine Marmier, chef du bureau arabe de Batna, avait un œil perdu.