Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 90.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

furent successivement enlevés et livrés aux flammes. Quelques heures après, abordé par le bataillon du 51e, Adjiba subit le même sort. Le soir venu, les troupes d’attaque rentrèrent, sans être inquiétées, au bivouac. Le 8, les Beni-Yala demandèrent grâce et payèrent une forte amende.

Tout semblait pacifié dans ces parages, quand le colonel Canrobert, qui était venu bivouaquer, le 10 juillet, au-delà du pic d’Akbou, apprit qu’une autre tribu importante, les Beni-Mellikeuch, surexcités par l’arrivée de Si-Djoudi à la tête de 2,000 ou 3,000 Zouaoua, s’étaient décidés à repousser tout accommodement avec les Français. Bientôt, en effet, Si-Djoudi fit déclarer officiellement au colonel qu’ayant pris sous sa protection les Beni-Mellikeuch, il voulait bien lui permettre de faire sa retraite, pourvu que le colonel s’engageât à n’inquiéter pas ses protégés. À cette sommation insolente, le colonel répondit le lendemain, 12 juillet, dès la pointe du jour, par un assaut général donné aux retranchemens des Beni-Mellikeuch. Les zouaves sur les ailes, le 12e et le 51e au centre s’élancèrent, et, après une lutte violente, dépostèrent l’ennemi. La résistance fut surtout acharnée sur la droite, au village d’Aïach, où le principal chef du pays, Si-el Kerib, avait sa maison. Les zouaves du 3e bataillon et les Zouaoua s’y battirent corps à corps, à coups de baïonnette et de yatagan, à coups de crosse, à coups de pierre. Deux fois le village fut pris et repris; mais enfin les zouaves en demeurèrent maîtres. Ils eurent dans ce combat 8 tués et 34 blessés. Le soir, les Beni-Mellikeuch firent leur soumission, et Si-Djoudi s’éloigna, les maudissant comme il avait maudit les Guechtoula naguère.

Le 18 juillet, le colonel Canrobert regagna son poste d’Aumale. Il en devait bientôt repartir pour aller prendre sa part d’action, d’éclat et de gloire dans l’un des épisodes les plus dramatiques de la guerre algérienne.


III.

A 40 kilomètres au sud-ouest de Biskra, sur la limite indécise du Zab-Dahraoui ou du nord, et du Zab-Guebli ou du sud, se trouvait un groupe de ksour peu visités des Arabes, à peine connus des Français. Ici même, dans la Revue, au mois d’avril 1851, le capitaine Charles Bocher, rappelant ses Souvenirs de la campagne des Ziban, a tracé de ces ksour, en quelques traits de plume, une esquisse parfaite : « Qui a vu, dit-il, un de ces centres de population, les connaît tous. Partout on y retrouve des forêts de palmiers qu’arrosent des rigoles combinées avec beaucoup d’art, et où se réunissent les eaux, soit d’une rivière voisine de l’oasis, soit de