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au nom du gouverneur, et prit avec lui le chemin d’Ouargla.

Le général Randon était venu d’Alger à Laghouat ; il y avait convoqué tous ceux, Arabes et Français, qui avaient pris part à l’expédition et des députés de toutes les populations du sud. « Ces députations, disait-il dans un ordre du jour aux colonnes Niqueux et Du Barail, qu’il venait de passer en revue le 9 février, ces députations qui viennent des points les plus éloignés faire acte de soumission à la France sont les heureux résultats de cette campagne. Vous devez en être fiers, car c’est sous la protection de vos baïonnettes que nos chefs indigènes ont glorieusement accompli la mission que je leur avais confiée. Nos goums, qui, de l’est à l’ouest, ont rivalisé d’élan et de bravoure pour la cause de la France, sont dignes de partager les éloges que je vous donne. Je signale avec bonheur cette communauté de bons services, car elle est la preuve de notre puissance en Algérie. »

Deux jours après, sur la place d’armes de Laghouat, se pressaient les députations de tous les ksour et de tous les douars; en avant se tenaient les grands chefs, graves et fiers, attendant l’investiture qui leur allait être solennellement conférée. Le gouverneur parut, escorté du colonel Durrieu, commandant supérieur de Mascara, du capitaine de Colomb, commandant supérieur de Géryville, et des officiers de son état-major. Si-Hamza s’avança le premier; son khalifalik s’étendait sur tout le territoire qu’il venait de conquérir à la France; après lui, son frère Si-Zoubir, puis les kaïds d’Ouargla, de Ngouça, des Chambâ, puis les cheikhs et les djemâ des Mzabites. Jamais cérémonie plus imposante et plus éclatante à la fois n’avait ébloui les regards émerveillés des Arabes; jamais image ne se grava plus profondément dans leurs)eux pour être évoquée toujours aussi brillante dans leur souvenir.

Afin d’achever et de consolider l’établissement du sud, il fallait prendre possession de l’Oued-Righ et du Souf. Tougourte, la principale oasis de l’Oued-Righ, est à 207 kilomètres au sud de Biskra et a 148 kilomètres au nord-est d’Ouargla. En 1854, elle était occupée par un cheikh, du nom de Slimane, qui était lié d’intérêts avec Mohammed-ben-Abdallah, le chérif. Celui-ci, expulsé du Djérid tunisien, vint, au mois de juin, s’etablir dans le Souf, puis, au mois de septembre, il osa se présenter devant Ngouça, son audace lui réussit; sur la seule menace d’abattre les palmiers, il se fit ouvrir les portes du ksar, et s’il est vrai que les gens d’Ouargla ne soient pas allés jusqu’à lui ouvrir les leurs, il n’est pas moins certain que plusieurs d’entre eux lui envoyèrent des complimens et même des chevaux de gada. Il était grand temps de couper court à cette nouvelle aventure. L’agha Si-Zoubir, qui était à Géryville, accourut en hâte, préserva Metliii, rétablit dans Ouargla l’ordre un moment